vendredi 29 novembre 2013

Phobie hotelière


Chacun ses fantasmes, chacun ses phobies, enfin elle le croit, pour se rassurer. Elle n'aime pas les chambres d'hotel. Elle les évite. Longtemps, elle n'a pas pu dormir dans une chambre d'hotel, alors elle se tournait et retournait dans ce lit qui décidément ne lui convenait pas. Elle dort n'importe où, par terre dans un couloir, sous une tente ou à la belle étoile, chez elle peu importe la pièce,même dans la cuisine ou dans la baignoire s'il le faut, dans sa voiture, mais c'est "sa" voiture.
Dans un lit d'hotel, si elle s'abandonne un peu, si elle laisse la place aux images qui se présentent, elle se sent assaillie, envahie, par tous les gens qui ont dormi là, exactement là, à sa place de ce soir. Ils ont laissé des traces, ce trou de cigarette sur la table de nuit, cette écorchure dans le papier peint, cette tache ineffaçable sur le couvre-lit, une odeur, un parfum, un relent de tabac. Rien, mais elle sent tout et si elle se laisse faire la panique l'envahit. Des visages, maquillés ou barbus, des corps lourds et suants ou secs et nerveux, des gestes, des paroles, des mots d'amour ou de dispute. Un meurtre peut-être un jour, va savoir, elle n'a pas lu tous les journaux.
Imaginer que là, à sa place, dans le cocon que devrait être sa chambre d'un soir, se sont succédés tant de personnages, tant de sentiments, tant de présences abandonnées au sommeil, la terrifie.
Des gens qui, dans la rue, ne lui adresseraient jamais la parole, avec qui elle ne partage rien, pas une bribe de connaissance. Et elle doit prendre leur place dans ce qu'il y a de plus intime, un lit.
Elle sait qu'elle pourrait en rêver, que ce serait prétexte à une imagination débridée, qu'elle pourrait se relever, écrire, faire des portraits, mais maintenant à l'hotel, elle l'avoue, elle prend un somnifère.

mercredi 27 novembre 2013

Je me souviens...

Je me souviens de beaucoup de choses; de beaux souvenirs d'école. Je me souviens de la bonne odeur des croissants qui flottait dans l'air et venait de la boulangerie ,les matins,sur le chemin du collège...  Je me souviens de peu de choses d'un coup; tout est parti comme un nuage fuyant le soleil... enfin pas tout à fait tout. Je me souviens des dimanches après-midi, où nous pique-niquions sur notre belle nappe rouge quadrillée dans l'herbe verte. Je me souviens de lointains et vagues souvenirs comme quelques bêtises d'enfants où nous sonnions  à la porte des voisins, et nous cachions la seconde d'après dans les buissons d'à côté. Oui... je me souviens de moments qui ne sont devenus un heureux souvenir que lorsque je me suis rendue compte que ces instants-là étaient uniques, et que je ne pourrai jamais les revivre de la même façon. Je me souviens de ma peur bleue du tonnerre, où je me cachais la tête avec un coussin, étant gamine. Je me souviens de la joie d'aller dans mon lit bien chaud les soirs d'hiver et de me pelotonner dans une couverture. Je me souviens, je me souviens... Je me souviens d'anecdotes sur mon enfance que j'avais oubliées et que m'avait racontées mes parents.  Je me souviens de rires, de fous rires, de jeux, d'ennuis aussi. Je me souviens et je profite du bonheur de la jeunesse qu'est d'avoir quatorze ans, de savoir qu'on a l'enfance derrière soi, mais la vie devant...

Je me souviens que je ne savais pas quoi écrire il y a dix minutes, mais je constate avec surprise et sourire que ma feuille et pleine, alors je devrais arrêter d'écrire...

Christina

mardi 26 novembre 2013

Elle avait tout vu, tout senti, tout dit et tout entendu...



Aujourd'hui, il était trop tard... Elle était devant un miroir, qui lui reflétait son image. Un beau visage à ce jour creusé par de fines rides; exprimant une longue expérience de la vie.

Ses yeux gris, perlés de vert montraient de la sagesse et un lointain souvenir vague et énigmatique de la jeunesse. Des yeux qui avaient tout vu, admiré, scruté, aperçu, observé, tant de choses; tant de  beautés : les doux champs de blés dorés à la lueur de l'automne, les belles montagnes, la mer si profonde et infinie, la campagne si sereine et apaisante, la forêt si sombre et silencieuse, la nuit si inquiétante et menaçante...Des yeux qui avaient tout vu. 

Un visage délicat et aux traits fins ainsi qu'un grand nez. Combien de fois ce nez elle aurait voulu l'avoir petit ! Elle ne s'en souvenait plus tant ce souhait l'avait ardemment hantée dans son enfance. Un nez qui avait humé, senti, respiré, aspiré tant de choses : l'odeur enivrante des roses à l'aube du printemps; la senteur fraîche et piquantes des champs de lavande lorsqu'elle allait en cueillir pour sa mère les soirs d'été; et celle des épices cannelle, gingembre, curry... elle les connaissaient toutes ! L'odeur du pain cuit, elle n'aurait pu l'oublier !  Un nez qui avait tout senti.

Un visage si gracieux et une bouche si petite, une "cerise" lui avait-on dit. Des lèvres qui avait tant dit, tant hurlé, crié, braillé, menacé, tempêté; mais aussi consolé, calmé, réconforté, et qui avait quelques rares fois souri... Des belles paroles qu'elle avait récitées; yeux clos; dans la nature; qu'elle avait déclamées avec respect et cérémonie. Une bouche; des lèvres qui avaient tout dit.

Un visage de poupée, à la différence qu'il aurait pu et semblait être en porcelaine, mais qui ne l'était pas...Deux oreilles, petites et discrètes, qui avaient tant entendu : des secrets, des mystères, des mots interdits, des insultes, des horreurs, des malheurs; des belles paroles encourageantes et aimantes. Elle avait tout entendu.

Un visage vieilli et amaigri, qui un jour avait été celui d'une déesse, personne n'en avait douté à l'âge de ses vingt ans. Une chevelure désormais grise qui avait été, autrefois; ondoyante, ruisselante comme une coulée d'or. Des cheveux qui avait été tant de fois tressés, coiffés, peignés, lavés, lustrés... Une chevelure dont le plaisir de la brosser avait été un bonheur de la jeunesse; malgré des souffrances en tant que petite fille sous les coups de brosse déterminés à évincer les épais nœuds se cachant au fin fond des cheveux... Des "boucles d'ange" disait sa Tante Rose à ses 15 ans. 

Un visage marqué par la vie, les épreuves, le bonheur, le malheur, la tristesse, la joie, la honte, la révolte, l'amertume, la colère, la mélancolie, la compassion, l'amour, l'amitié... Par la Vie. Une existence peuplée de rêves, de songes, d'illusions, de fantasmes, de souhaits; espérés, souhaités... Une humaine qui avait tout vu, tout senti, tout entendu, tout dit...

Un visage exprimant la paix...
Oui elle avait été heureuse...
Un destin arrivant au terme de son voyage.
Un dernier petit sourire.

La fin.

Deux yeux perlés qui se refermèrent à tout jamais...


La paix, le néant, le vide....
Plus rien...



Christina

lundi 25 novembre 2013

ton arrivée chez nous

Ton arrivée chez nous.
Peu après le 15 Août. Il faut libérer la chambre, d'autres attendent un lit, d'autres qui comme toi sont à terme comme disent sèchement les soeurs de l'hôpital . Il fait chaud mais tu enveloppes le bébé dans un châle, instinct maternel de protection. Et toi tu saignes, normal disent encore les soeurs. Tu remets la robe à carreaux que tu portais quand un voisin t'a amené, elle flotte maintenant sur ton ventre vidé. Quelques affaires, ceux de la petite, tu avais tricoté comme on te l'avait enseigné, quelques affaires dans la valise en carton fermée par une ficelle trouvée en hâte dans la grange en partant, quelques affaires rassemblés et te voilà dehors. Sur le trottoir , personne, tu pensais qu'il viendrait mais personne. Alors, tu te diriges vers le bus, t'installes sur la banquette de cuir usée et tu renverses la tête dans un profond soupir. La petite pleure, tu n'oses pas, tu n'oses pas ouvrir la blouse, alors tu berces, tu berces et tu t'endors. Brimballant, le car arrive au village, il fait presque nuit, le grincement du frein à main te réveille brutalement. Avant de descendre, tu balaies la place du regard, il n'est pas là. Tu traverses les champs de blé, longes la rivière, la lune t'accompagne, tu arrives à la ferme le coeur serré, pousses la porte, il est là, couvert de sang, il te regarde:" La Blanchette a mis bas ce matin".
Les yeux pleins de larmes, tu déposes le bébé sur la table: "Moi aussi, je l'ai appelée Odile et le veau?"
Le silence était lourd et s'étendit de longs jours. Ce doit être pour ça, ma chère Odile que tu es si volubile!

dans mon bateau

Dans mon bateau
Il y a des bonjours
Des bonjours de tous les jours
Et des p'tits mots qui font du bien

Dans mon bateau
Le matin c'est du remue-ménage
Et plein de gens de nettoyage
Et du silence dans un coin nommé jardin

Mais moi, je préfère les perruches
Elles piaillent au bout de la rue

Dans mon bateau
Il y a des visiteurs
Qui inondent les ascenseurs
Et des habitants de toute sorte

Dans mon bateau
Il y a souvent de belles photos
Et plein d'expos
Il y avait même un touareg et es bibelots.

Mais moi, je préfère les perruches
Elles piaillent au bout de la rue

Dans mon bateau
Il y a un boulanger qui aime pas les chiens
Et des étages où il n'y a rien
Puis dans son ventre y a un resto et des bobos

Dans mon bateau
On voit des arbres et des collines
Des écureuils et toute la ville
Il y a même une école pour les petits

Mais moi, je préfère les perruches
Elles piaillent au bout de la rue.

Dans mon bateau
Il y a des livres
Un jardin avec des aubergines
Dans mon bateau on est sur terre et sur la mer

Dans mon bateau
Ce qu'il y a de plus beau
C'est là haut, la mer et les autres bateaux
Et les couchers de soleil qui embrasent le ciel

Mais moi, je préfère les perruches
Elles piaillent au bout de la rue.

C'est ma rue au Corbu.



dimanche 24 novembre 2013

Dans le parc à côté de chez moi

Dans le parc du MAC, pas très loing
Y a des chieng, encore et encore des chieng
Trop bien nourris, ces roquets
Bien mieux que certains humaing
Encore plus nombreux que les moufflets
Mais moins que leurs traces de crotting

Derrière le parc du MAC,
Très discrets y a les flics
Du huitième, pour que l'ordre règne
On sait pas pourquoi jamais ne viennent
Pas le temps? Trop de truands?
Les zélés, on les comprend

Dans le parc du MAC, ou pas très loin
Les boulistes sont ravis, même au petit matin
Il y a foule quand ça bruit, ça défie, ça maudit
Mais les boules, on sait pas ce qu'elles diraient
Quelles histoires raconter quelles envies elles auraient.

Mais il y a aussi et Roxie et Snoopy
Et Choupette, et Léo
Il y a aussi la lumière qui rend vie
Les footeux, les rêveurs, les badauds.

Dans ce parc si joli, oh pas loin, pas trop loin,
La ganja coule à flots, au bas mot,
La bière se retire en laissant ses goulots
Les camés jouent aux quatre coins
Le commissaire s'en cogne, pas son boulot
Pour lui, tout ça c'est clair, c'est bien trop loin.


vendredi 22 novembre 2013

Dans ma cour


Dans ma cour
Il y a des gosses
Qui jouent du matin au soir
Ou en sortant de l'école
Dans ma cour

Dans ma cour
Il y a plein de portes
Souvent béantes
Sur des escaliers sales
Dans la cour

Et des gens qui s'apostrophent
D'une fenêtre à l'autre
Des gens qui chantent et qui crient
Il y a aussi beaucoup de bruit

Dans ma cour
Il y a Monsieur Zen
Qui traverse à tous petits pas
Ecartant du bout de sa canne
Les détritus qui trainent
Dans la cour

Dans ma cour il y a des chats
Et des mémés qui les nourrissent
Qui les attirent, qui les caressent
Dans la cour

Et des gens qui s'apostrophent
D'une fenêtre à l'autre
Des gens qui chantent et qui crient
Il y a aussi beaucoup de bruit

Moi dans la cour je guette
La fenêtre du troisième en face
Volets croisés, lumière et ombre
Une fille habite là
Elle est souvent nue en été

J'attends l'été et je rêve
Qu'un jour elle entrebaillera ses persiennes
Qu'un soir elle me fera signe
Que la nuit je serai blotti dans ses bras

mercredi 20 novembre 2013

Des cerises et un regard....

Un beau soleil radieux et souriant, brillait ce matin-là. Enfin... il aurait pu pleuvoir et elle n'aurait pas porté une de ces fines blouses fleuries, mais un long manteau noir et un béret gris sur la tête. Et si son béret avait été sale ? En aurait-elle porté un noir ? Et s'il avait neigé alors ?

Ce jour-là, m'avait-on raconté, elle était partie tôt de chez elle, maisonnette chaleureuse et accueillante, perdue dans un village petit et mignon. Si ça avait été un village moche et grand, cela n'aurait rien changé à l'histoire, mais juste enlevé le charme du moment où elle partait....

Un panier à la main, elle déambulait l’allée principale du village, puis se faufila discrètement dans le champs de cerisiers. Le vent lui hâlait le visage au fur et à mesure que le temps passait et que le nombre de cerises semblait augmenter à vue d’œil. Si elle n'avait pas été dans ce champs-à; elle serait peut-être allée dans un verger, l'odeur des pommes lui piquant délicieusement les narines. Mais il en fut tout autrement ce jour-là.

Le panier rempli de fruits, elle rebroussa chemin, en rentrant par un petit sentier caillouteux  de campagne. Bringuebalant le panier tout en marchant gaiement, elle chantonna un petit air champêtre... Quand soudain, elle entendit des bruits. Elle s'arrêta net de chanter. C'était des pas, qui étaient proches, mais qui s'approchèrent plus et encore plus, près et encore plus près, quand tout à coup, le mystérieux inconnu fit son apparition...Elle vit subitement le regard lagune d'un beau jeune homme; souriant.  Des yeux bleutés où se mêlèrent ses yeux verts. pour longtemps; très longtemps....

Fut-ce une seconde, deux heures, cinquante ans ? Qu'en sais-je ? Mais qu'est-ce que cela aurait changé à l'histoire ?

Tout ce que je sais, c'est que des années plus tard; deux ou quarante ans après; je les voyais se sourire mutuellement, en train de manger des tartines de confiture à la cerise...

Si elle n'avait pas décidé de cueillir des cerises ce jour-là, je n'aurais probablement pas été là....


Et qu'aurait été l'histoire, si elle avait été dans un verger ?  



Christina

Dans ma rue

Dans ma rue d’abord il y a un mur
Tu vois c’est mal parti
C’est comme qui dirait fini
Parce que ma rue, c’est une impasse

Dans ma rue il y a des voitures
Bien rangées, bien serrées
Il y a aussi des chats
Et pour eux, des oiseaux

Dans ma rue y a la nature
Qui crève le bitume
Le jaune obstiné du pissenlit
Au printemps le rose, le jaune, le pourpre
Des mufliers rescapés
En automne, aujourd’hui, le parfum sucré du nèflier

Dans ma rue il y a aussi un cyprès
Pour mon chat écureuil
Et puis pour dire le printemps
Il y a même un amandier
Qui sème au vent ses papillons blancs

Dans ma rue il y a une fille
Qui fume seule à son balcon
En regardant sa rue
Et puis il y a un chien
Qui  tient en laisse mon voisin

Dans ma rue y a pas d’enfants
Y a pas beaucoup de gens
Normal
Ma rue c’est une impasse
Qui a envie de se prendre un mur ?

Dans ma rue
Qui n’est pas ma rue
Il y a aussi une porte
Quand vous viendrez
Vous n’aurez qu’à sonner

Parce que c'est un homme

Il aura fallu ce 11 novembre 2013 pour que me revienne le souvenir de toi.
Je l’ai pourtant bien connu. Il était cet homme de peu de mots,  cet homme si effacé, qui tenait si peu de place que sa vie n’a presque pas laissé de trace.
Le 11 novembre 1918 il devait avoir 20 ans et il avait survécu. Il avait pu connaître la fin du massacre. Pas de gloire pour les survivants.
Moi, je me souviens de ce jour au cœur de l’hiver 1917. Le ciel est bas, le froid impitoyable. Aucun oiseau ne chante plus. Il sort de la tranchée tout habillé de boue et de vermine. C’est son tour. Il doit aller chercher de l’eau vingt mètres plus loin. Vingt mètres de terreur, de boue, de sang c’est très loin. Des racines serrent ses godillots béants, la peur lui tord le ventre, ses bidons vides sont lourds. Enfin voilà le chant de l’eau qui court. Bientôt il y sera à cette source d’eau miraculeusement claire et vive à l’orée de cette forêt nue. A la source il a vu une silhouette. A la forme du casque il a su que c’était l’ennemi, comme lui armé, comme lui terrifié, comme lui obligé, bon à tuer. Envie de se coucher, de poser ses bidons. Il fait un pas de plus, il s’arrache de la boue encore un pas de plus. Il voit le visage de l’homme, il y lit sa mort. Mourir ce jour de noël. Oui, ça va se passer comme ça. Lequel des deux a, le premier, levé la main et souri. Il ne savait plus bien mais moi je sais que c’était lui. Ce grand père qui ne m’a pas donné son sang mais simplement son amour quotidien.

lundi 18 novembre 2013

Peur :

Monstre glacé visqueux et mou qui fige le cœur ou l’accélère, il brûle, il paralyse la pensée et inhibe l’action. Le corps devient lourd. Ce monstre crée le danger si nous n’y prenons garde. Sans doute notre corps a-t-il gardé la mémoire d’une première terreur.
Il nageait, léger, balancé dans une pénombre tiède, pleine de murmures. Brusquement, dans des hurlements le voilà jeté dans une lumière froide et crue, il est lourd, dans un déchirement les poumons se déplient sous la pression d’un élément inconnu : l’air, c’est un autre commencement, l’apprentissage de la douleur.

Jubilation

Jubilation. Mot rare
Emotion précoce et vive
Frémissante, tremblante, dorée
Jaune tendre et vert orangé
Resurgie comme une source perdue
Conseil ami : ne pas l’attendre

De la peur à la renaissance

Je descendais les pentes du volcan, les chevilles gonflées par l'effort de l'ascension, noircie de la tête aux pieds du pouzzolane collé au corps par l'humidité. Fatiguée mais ravie d'avoir assouvi ma curiosité, fière d'avoir conquis ce géant fumant sur la méditerranée, j 'écartai le roseaux à la recherche d'un bateau à l'horizon. Je me rapprochais des premières maisons blanches et me réjouissais déjà des gorgées de vin dégustées sous les tonnelles. J'apercevais la mer dont l'écume brodait les roches noires et ourlait la plage d'un liserai argenté. je m'arrêtai un instant, je m'imprégnais de tant de force et de beauté réunies. Je vidais mes chaussures, étalais mes orteils au vent quand un grondement effroyable emplit l'espace, en quelques minutes le paysage prit des couleurs apocalyptiques. Vulcain hurlait de colère et crachait son souffre dans l'atmosphère. J'étouffais, mon sang se glaçait malgré la chaleur, j'étais terrorisée. Des sueurs froides cheminaient le long de mes os, j'étais plus morte que vive, je ressentais le néant. Dans la panique, j'oubliais mes souliers et me mis à cavaler le long de la pente. Il fallait échapper à la lave brulante. Malgré l'effroi, je n'étais pas pétrifiée, la panique me transportait. J'accomplissais des performances jusque là inégalées. Je m'écroulais enfin sur le sable chaud, livide. Je tremblais, Vulcain riait en regagnant les entrailles de la terre.
Transie d'épouvante, la tête enfouie dans mes genoux repliés, je me mis à pleurer, cette explosion avait résonné au plus profond de moi, il me semblait que mon corps était en ruine. D'un revers de main j'essuyais mes larmes pour découvrir l'ampleur du séisme. Le silence était roi, total comme aux premiers temps. Les vignes étaient anéanties, les maisons dévastées et ce silence....un autre monde.
Soudain un oiseau lança un cri strident, il redessina le ciel et réveilla la mer puis des voix dans le lointain, l'accent italien....un autre monde, d'autres vies que la mienne, d'autres vie pour échanger, partager.
Un frémissement dans mon être, un jour nouveau va naître:
Une renaissance
Des rubans qui avancent
Une sève nouvelle en spirale
Des mouvements d'émerveillement
Des rubans qui avancent
Lumière d'or des anges
Instants de grâce
Et des rubans qui avancent
A l'horizon , des sons
Une lyre qui chante la vie
Une corne d'abondance
Et des rubans qui avancent
Et pourquoi pas une nouvelle jouissance
dans la farandole des rubans qui avancent


  

dimanche 17 novembre 2013

Quand on se réveille dans l'espoir, le matin par la fenêtre on voit...

Quand on se réveille dans l'espoir, le matin par la fenêtre on voit...
Que les oiseaux chantent et les arbres dansent.
Que les nuages brillent et les feuilles scintillent.

Quand on se réveille dans l'espoir, le matin par la fenêtre on voit...
Que les fleurs rient et le ciel sourit...
Le monde à l'envers, le bonheur tout en vert.

Quand on se réveille dans l'espoir, le matin on se dit...
Qu'on est content, heureux de vivre, on inspire l'air à pleins poumons et on se dit :
"Chouette, le soleil brille ! "

Christina

Elle était là... et pourtant...

J'étais trop loin, trop loin pour la voir; trop loin pour l’apercevoir.
Trop prêt pour la regarder.
Trop prêt pour l'observer.
Trop fatiguée pour l'approcher.
Trop paresseuse pour l'imaginer.
Trop curieuse pour l'oublier !

Christina

La porte rouge

A 78 ans il monte les 327 marches difficilement. Le vieil homme est résigné, son heure approche, il sait qu'il lui faut partir. Il entreprend l’ascension une dernière fois. La vue de là-haut y est tellement magnifique. Emilian sera le 58 ième gardien de phare à y être passé, il aurait bien aimé un compte rond mais il est né deux générations trop tôt. Il est temps de laisser sa place à son fils, comme l'avait fait son père.
Il lui a déjà tout expliqué, tous les mécanismes, les marées, la force du vent, les horaires d'allumage des feux en cas de mauvais temps, le sens de rotation de la terre et même le langage des mouettes. Il n'a rien oublié, les variétés de poissons, les migrations des baleines, le phénomène lunaire sur les marées, l'impact des bateaux sur le climat, la hauteur des vagues par force 7, la portée du phare par temps dégagé, sa hauteur exacte au centimètre près... il ne veux rien laisser au hasard.
Une petite chose tracasse son fils tout de même, c'est cette porte rouge enfoncée dans la roche, juste à côté du débarcadère. Cette toute petite porte rouge, toujours fermée, qui semble n'avoir aucune prise sur le temps. Pas une égratignure, aucune trace de rouille, une porte discrète que l'on aperçoit à peine et dont personne ne parle. Cette mystérieuse porte, arrosée par les embruns, agressée par les tempêtes, torturée par le soleil, qui défie bravement les éléments jour après jour.
Emilian ne lui en a pas parlé, pas plus que son père ne l'avait fait, ces choses là ne se transmettent pas, elles se vivent.
Le vieil homme redescend doucement de son phare, exténué mais serein. Il sort. Le pas traînant il se rend devant la porte. Immobile, sans un mot, il attend. Elle s'ouvre doucement. Il se retourne pour admirer l'océan, une dernière fois, et franchi le seuil obscur... qui se referme derrière lui pour l’éternité.

Raoul-le-bourru

Tout le groupe était installé autour de la table et écoutait les consignes de Pierre. Raoul n'était pourtant pas bien à son aise. Ce personnage un peu bourru assistait sans vraiment de conviction à son premier atelier d'écriture. Son amie l'avait inscrit la semaine précédente, convaincue bien plus que lui de ses qualités d'écrivain,
... alors il s'y était rendu.
Légèrement distant au début, il se referma au fil des minutes puis explosa à la fin :
« Deux heures ??? Merde alors, c'est du grand n'importe quoi, quel intérêt j'aurais à me promener dans les rues de Manosque pendant deux heures avec un carnet à la main ? C'est des conneries tout ça ! » et il sortit de la salle en claquant la porte. « On est là pour apprendre à écrire et pas pour s'balader » ronchonna-t-il.
« … Et puis de toute façon j'ai jamais aimé cette ville ! » lança-t-il en s'engageant dans une ruelle.
Bon... Maintenant qu'il y était, il se mit tout de même en route et joua le jeu... juste histoire de prouver qu'il avait raison. 
D'autant plus que c'était le jour du marché. « Pff... Il manquait plus que ça ! » pensait-il, persuadé qu'après ces dernières journées pluvieuses, tout le monde avait envie de profiter du soleil.
«Ah ça, il va y en avoir des emmerdeurs aujourd'hui !»
Parlait-il de lui ?
Il décida donc de se diriger dans des lieux moins fréquentés tels que les petites places, les ruelles étroites, les parkings. « Manosque ne manque pas de petits recoins tranquilles et loin du bruit » marmonna-t-il.
Bien... Le voilà débouchant sur une placette déserte avec une jolie fontaine encerclée de bancs en bois. L'endroit est agréable et aucun bruit ne perturbe cette quiétude. La fontaine. sèche et silencieuse, attend patiemment les beaux jours pour accompagner en musique les gazouillis des oiseaux... ce qui inspira Raoul : « Ils feraient mieux de remplacer tout ça par un parking, au moins la fiente de ces sales bêtes se confondrait avec les taches d'huile de moteur ! »
Il ne supportait pas les pigeons : « Ils chient partout et fuient dès qu'on s'approche d'eux  ! »
Raoul essayait parfois de leur mettre des coups de pied mais sans succès.
Il continua jusqu'à une autre place, celle des Ormeaux... Là, il marqua un temps d'arrêt un peu plus long. Raoul reconnaissait le lieu. Il se souvint d'une boucherie à l'endroit de ce bâtiment, il venait y voir son cousin et tous deux descendaient en cachette explorer les vieilles caves remplies de monstres de toutes sortes. Il resta figé un instant, les yeux noyés dans ses souvenirs, tendre moment de répit, douce saveur du passé... quand subitement il attrapa une pierre à ses pieds et la lança violemment sur une des fenêtres :
« Saloperie de Pigeon... Je te raterai pas la prochaine fois ! »
Disons que ce n'est pas un sentimental Raoul.
Il dégagea de la place rapidement afin d'éviter toute discussion sur la fenêtre qu'il venait de casser. C'était sans compter sur cette vieille dame qui promenait son chien en laisse. Elle maintenait le regard braqué sur lui à la façon des Cow-boys dévisageant leur adversaire... C'est Raoul qui dégaina le premier :
« Ferme la bouche la Vieille ou tu vas faire tomber ton dentier ! », puis il mit un coup de pied au chien.
Il ne supportait pas non plus cette manie qu'ont les chiens de pisser n'importe en toute impunité.
C'était fait, mais tout ceci l'avait bien excité et il ne voulait pas en rester là. Le voilà parti pour « aller se moquer de tous ces imbéciles qui s'agglutinent au marché et qui jouent des coudes pour quelques fruits que tout le monde tripote... Bonjour l'hygiène ! »
Déboulant dans une rue bien agitée, bien trop pour lui, il faillit renverser une Mamie qui tirait son caddie. « C'est ça, ne vous poussez pas surtout, prenez toute la place ! Il devrait y avoir une voie réservée pour vous, à sens unique et sans issue ! » . Le bougre prenait confiance : «  Pousse toi Mamie ! » hurla-t-il d'autant plus exaspéré qu'un joueur d'accordéon couvrait de sa ritournelle tous les bruits de la rue. L'homme envoyait sa bonne humeur aux badauds qui lui rendaient avec un sourire... ce qui eut le don de faire déguerpir notre Raoul, trop inquiet de préserver sa mauvaise humeur sans doute.
Il arrivait au marché, et effectivement ils étaient tous là. Le tableau parfait que beaucoup décrivent comme une photo Provençale : les odeurs qui virevoltent et s'amusent à titiller les papilles, les couleurs chaleureuses qui invitent au voyage ou à la sieste, les conversations croisées qui s’entremêlent, les yeux malicieux des enfants devant les étalages de bonbons multicolores, les joyeux boniments des vendeurs qui haranguent la foule, et puis tous ces étalages de tissus aux couleurs éclatantes de soleil et de lavande, tout semblait faire partie d'une joyeuse représentation du théâtre de la vie, tout était remarquablement en place ce jour là... sauf notre monsieur ronchon qui assistait désolé à « … Un spectacle affligeant de gens qui ne savent pas ce qu'ils veulent ni où ils vont et qui tournent en rond» . Il ne demanda pas son reste et préféra faire demi-tour... juste après avoir agressé verbalement ce brave vendeur de bibelots : « Arrêtez un peu de gueuler et de prendre les gens pour des cons parce que bizarrement j'ai vu les mêmes articles moins chers à la Farfouille ! Allez donc gueuler sur la Criée en compagnie de poissonniers marseillais, on verra si vous aurez autant de bagout à la fin de la journée... quoique avec la tête de rascasse que vous avez, faites gaffe quand même de ne pas finir sur un de leurs étals ! »
La satisfaction se lisait sur le visage de Raoul, depuis le temps qu'il voulait la placer celle-là.
L'expérience s'arrêtait là, il retourna rejoindre le groupe afin de poursuivre l'atelier.
Il prit tout de même la peine de s'excuser pour son retard, puis s'installa sur une chaise... pour immédiatement se relever et couper la parole à sa voisine qui commençait à exposer son texte. Il expliqua que, comme il l'avait dit, cet exercice ne lui a rien apporté du tout.
« Bien, voilà un point de vue intéressant, répondit Pierre calmement. Gardez donc vos émotions intactes et retranscrivez-les comme vous le sentez. Laissez-vous simplement guider par tout ça et écrivez ce que vous avez envie.
— … Ah ?... bon ! » s'étonna l'homme. Contre toute attente, il sortit son cahier, et, en même temps qu'un léger sourire se dessinait sur ses lèvres, il s'empara de son stylo...
Raoul-le-bourru ne s'est plus jamais arrêté d'écrire depuis cette fameuse matinée et, bien que moins agressif, son caractère bougon nous donne de temps à autre un texte assez... truculent.


Canevas de phrases

La plupart du temps, celui que l'on cherche est en soi. Enfin, c'est ce qu'un huluberlu nécrophile a jugé bon d'écrire sur la route du cimetière, déguisé en jogger athlétique mais léger. L'entrée dans la forêt était faite pour lui, ce paumé... En fait, il y a bien longtemps, bien avant que cette plume ne courre sur le papier, on cachait Dieu mieux que ça : dans le coeur des humains. Là, au moins, il ne risquait pas de bouger bien loin, et pas grand'monde ne se risquerait à aller l' y chercher.

doubles vies, jumelles

    Soleil au nadir, je traverse le miroir, de travers en traverses, quitte mon quotidien d'humain, frôle le divin, drôle néanmoins. Je coupe sa ligne de cristal Made in Nowhere. Elle perd sa rectitude, un sang me suit, nauséeux, mais ce n'est pas demain que je passerai la main. C'est si bon de s'arrêter, musarder, voir s'étirer le temps  si peu dense derrière le tain. Plein devant, néant derrière, intense  ici, vide là, je fais un moment le malin, à rire de celui qui fait des erreurs, peine et souffle, la tête dans le guidon. Il ne me voit plus, ne m'entend plus, ne se gêne plus, il vit; et moi je ne suis plus qu' un regard éteint, muet, serein néanmoins. Enfin, jusqu'à l'instant où s'est posée la  question de savoir comment revenir de l'autre côté du miroir, celui qu'on dit être le bon...

Une vie dévie

    Parfois une vie dévie, rêve de rêvolution, et donne envie à d'autres vies d'autres vies. Elles inondent alors et grondent sous le canevas lisse des habits las, des us usés, retournent l'humus social à pas d'heure. Cette vie se croit toute seule à sillonner le mensonge des effarouchés, et puis elle en rejoint d'autres, qui labourent cette élégance des cyniques de leurs ongles mal équarris, noircis à force de creuser dans les secrets des couloirs opaques des pouvoirs, des réseaux sans raison.
    Ces vies transforment alors leurs doutes en bannières, un nouvel équilibre est prêt pour le partage, l'humour hume quelque temps un autre vent, la mer se retire , elle sait que ceci ne durera qu'un temps, et elle prépare, sereine au loin, la prochaine invasion des impatients.

L'arbre liberté

Oui, j'ai tendu la main à un prétendu criminel qui fuyait, le pétard rastacouère à la main.
Oui, j' ai enterré mes rêves dans une cabane abandonnée.
Oui, j'ai hurlé sans raison devant l' hôpital de la prison
Oui, j'ai chanté Gare au Gorille sous la fenêtre des condés
Oui, j'ai découpé le crâne d'un rat avec un silex trouvé au musée d'histoire
Oui, j'ai joué à Guillaume Tell sur la casquette du postier. Elle se déplaçait si bien,détachée au dessus du mur du voisin!
Oui, j'ai blasphémé, oui, j'ai médi, oui j'ai haï, oui j'ai maudit. Mais Dieu m'a viré quelques coups de pieds bien sentis, la méditation m'a pris, la haine m'a fui, et les maudits sont partis.

Messe basse pour main basse

Ma main s'étend au delà du bras qui l'a vu naître. Là elle vole, elle rampe, elle coule. Poussée par la curiosité, elle ne craint même plus la séparation, elle sait revenir à volonté. Si elle veut. Bien sûr...
    Ce soir c'est Juillet, donc sortie en mer! Elle pousse de tout son instinct dans la fosse abyssale de Cassideigne, saluer les cachalots et les globicéphales, dépasser les dauphins médusés, et devant les éclats du phare, gerber à son rythme le plancton incandescent dans un feu d'artifice d'enfer. Et puis ma main revient, repart, rien ne sert aux pécheurs, juste un bye de la main...
    Elle ne rentre que pour reprendre un peu de forces, raconter ce qu'elle a vu à son altère egote. Je ne parle pas l'italien, mais la langue des mains nous aide, ma main rigole, et me raconte aussi des trucs que l'autre main ne saura jamais.

17/06/2013

Liste de mots

Réveil: un réveil c'est fait pour se rappeler qu'on aurait pu se coucher plus tôt, qu'on s'est dit la veille qu'on ferait quelque chose de demain, ou simplement se réveiller, pour ne pas penser, ne pas rêver.
Vélo : un vélo c'est pour sentir la route et le vent, penser tout haut sans réveiller les métropolitains.
Architecte : Un architecte c'est pour rendre les cailloux beaux, le béton beau. Et les villes moins grandes.
Alligator : un alligator, c'est pour animer les longs fleuves tranquilles, et à l'occasion nettoyer les berges des barges qui y trainent.
Magnat :  Un magnat c'est quelqu'un qui a besoin de montrer aux autres qu'il a grandi
Diode : Une diode c'est une lampe parfois, un bout de matière inerte la plupart du temps
Caverne : Une caverne, c'est là d'où nous venons, même si les occasions de nous en rappeler se font rares dans nos cités.
Silo : un silo, c'est si long qu'on en voit plus la faim.
Pain : Un jour sans, c'est long.
Index :
Concours : un concours, c'est pour que les cons courrent. Il faut bien trouver une raison, non?
Salut :
Rire :
Panier :


17/06/2013 (oui Patrick, chui à la bourre ;-)

samedi 16 novembre 2013

L'ombre dans la nuit...

Je me souviens de cette femme à la robe blanche. C'était la nuit et il faisait très sombre.  Le seul halo de lumière était la lune qui projetait ça-et-là, des ombres nacrées. Je voyais une forme ou plutôt une silhouette fine... J'avais du mal à distinguer sa chevelure. Seuls ses yeux pâles brillaient comme deux étoiles. Il y avait de la brume; était-ce de l’amertume dans son regard ? Un regard froid, comme la température glaciale qu'il faisait ce soir-là ? Était-ce de la douceur qui irradiait son regard ? Un regard clair... mystérieux... énigmatique; fantomatique; fantastique ou encore; lunatique ? Clair et foncé à la fois. Une ombre dans la nuit, une silhouette vaporeuse et indistincte, comme une traînée de poussières de fées, scintillant à la lueur de la lune. Une forme dans le néant.

Il y avait un noir ténébreux, ce soir-là.

Christina

jeudi 14 novembre 2013

End of graff

Bansky sort de la salle de bains, serviette nouée autour de la taille. Il vient de prendre un bain chaud. Sa peau est encore moite et ses cheveux humides. Il s'assoit dans le salon, sort de la cocaïne d'un sachet et se fait un rail en terminant un fonds de whisky. ..
Le téléphone sonne encore et encore mais il ne répond pas. Ses yeux sont tristes et sans expression aucune…
Il se lève et va d'un pas lourd vers la fenêtre qui ouvre d'un coup sec… Le froid le saisit sur tout le corps... il frissonne et regarde dehors.
Il voit des lumières qui  lui font cligner des yeux et les passants aller et venir dans les rues animées . Au-dessous, il y a des  bars, des restaurants, des pubs d'où s'échappent des musiques entraînantes.
Comme il déteste ces couples qui marchent en se tenant par la main et surtout comment il les envie. Ses yeux se perdent dans le vague. Il referme doucement la fenêtre et se retourne. Il marche jusqu'à la table de nuit et allume une cigarette. Soudain le téléphone sonne encore…
 Il regarde autour de lui. Ses yeux s'attardent sur les tableaux zen, les couleurs brunes, taupes et mordorées. Des bouddhas aux doux visages lui sourient. Des drapés blancs immaculés entourent le lit en teck bordé de plantes luxuriantes. La lumière du minibar entrouvert allume son visage triste. Il marche jusqu'au salon. Ses pieds foulent des tapis de coco de couleur beige il  remplit à nouveau son verre d'une longue rasade de whisky qu'il boit d'un trait. La tête lui tourne, il ferme les yeux…
Le téléphone retentit à nouveau… Il regarde l'écran et décroche, c'est elle ...
Le crime
le coupable entre dans la chambre en laissant le dehors faire irruption.
-Allô… Kate ?what's happening ?
Sa voix à l'autre bout du fil se perd et se confond. Bansky qui ne comprend rien à ce qu'elle dit, il n'entend que la peur dans sa voix… Il y entend des sanglots étouffés et surtout cette peur qui l' étrangle . Il essaie de la rassurer… Baby… Tell me… Mais soudain plus rien… Le silence à l'autre bout du téléphone. Des coups secs frappés  le font sursauter… Il se lève et marche tel un automate vers la porte imposante. Il ouvre, elle est là devant lui. Elle ressemble plus à une petite fille perdue qu'à la femme qu'il aime passionnément.
Elle entre en titubant, il croit refermer la porte mais elle se rouvre violemment derrière Kate poussée par la fureur de son amant éconduit qui n'est autre que Pete  Doherty !
Kate tombe à genoux mais il ne voit que son rival face à lui, les yeux injectés de sang, le visage déformé de rage. Pete se jette sur elle et lui assène un coup qui la laisse inanimée .
Bansky reste pétrifié.
Si elle est morte, il veut mourir avec elle.
Il ne sent pas les coups qui pleuvent sur son corps et son visage…
Son bourreau lui enserre la gorge tout en plantant dans les yeux de sa victime son regard  meurtrier.
Il ne se débat pas, il lâche prise.
Pete, le musicien, dans sa fureur finit de lui ôter son dernier souffle de vie en lui crachant au visage.
Bansky tombe, mort.
Kate est là, toujours inanimée. Alors Pete regarde autour de lui et voit une valise entrouverte ainsi qu'un sac rempli de bombes de peinture à graffitis.
Il relève Bansky, l'allonge sur le lit. Il est nu. Artiste perdu mais artiste De quoi ?
Lui même est un artiste connu dans le monde entier. L'autre n'est qu'un imposteur ! Alors dans un sentiment de revanche, Pete le met en scène pour sa dernière représentation telle une statue pétrifiée dans la position de L'homme De Vitruve et recouvre son corps de sa peinture abjecte…
Il se retourne, prend Kate dans ses bras,  poupée de chiffon.
 Il pousse la porte et laisse Bansky dans son ultime posture. Il ne sera jamais un maître en son domaine, seulement une pâle copie.... L'imposteur d'une vie , l'imposteur de l'amour de la sienne .
Eddy Nash.
Eddy Nash gara sa voiture d'un coup sec devant la devanture de l'hôtel. Plusieurs voitures de police dont les gyrophares clignotaient tel un ballet effréné dans le matin froid de Londres  étaient déjà postées en ligne. Il ouvrit la portière et sortit d'un pas lourd. Ses yeux se levèrent sur les lettres clignotantes de la devanture du Central London Hôtel .
Il observa un moment le va-et-vient de la dense circulation, alluma une cigarette et s'avança vers l'entrée scintillante dans le soleil.
Nash monta directement dans la chambre numéro six. Cheveux en bataille d'un brun roux, barbe naissante sur un visage anguleux et calculateur, Nash  portait un costume sombre d'un bleu froissé, ainsi qu'une chemise au blanc douteux.
Quand Nash arriva dans l'embrasure de la porte de la chambre, il montra son insigne sans jeter un seul regard au policier posté en faction à l'entrée.
Son regard se posa d'emblée sur le cadavre d'un homme allongé sur le lit de la chambre et s'arrêta sur son visage. Son regard perçant s'attardait sur chaque détail. Il semblait figé.
Seul un muscle qui tressaillait sur sa joue montrait sa nervosité. Les allées et venues de ses collègues de travail n'entamaient en rien sa concentration. Il resta là, sur place, au moins de dix bonnes minutes puis d'un coup se dirigea vers le lit.
Son corps longiligne se plia vers le visage d'un homme qui lui paraissait tout à coup familier. Nash était enquêteur depuis huit à dix ans dans une unité spécialisée dans les crimes à  signature particulière. Lui-même ne savait plus chiffrer ces années exactes à traquer des meurtriers dont les crimes étaient les plus odieux et les plus détraqués. La seule certitude qu'il avait, était que c'était un crime particulier vu la mise en scène de la victime .
Il savait aussi que ce n'était pas l'œuvre d'un serial killer étant donné que c'était  la première fois qu'il voyait une telle mise en scène.
Observation faite de la victime, Nash parcourut à petits pas l'étendue de la chambre en regardant chaque indice prospecté par la police scientifique.
 Il se dirigea ensuite vers les affaires personnelles de la victime  et découvrit dans la poche d'une veste posée sur le dos d'une chaise, son portefeuille.
Quelques billets dont un provenant de Madagascar, des feuilles de cigarettes, des photos d'identité en noir et blanc de visages différents dont une, coupé en deux. Certainement des souvenirs... Ceci lui parut intéressant mais ce qui l' intrigua le plus, c'est qu'il n'y ait à l'intérieur du portefeuille aucune pièce d'identité ni permis de conduire. Il chercha encore dans le moindre recoin et en sortit une petite feuille ornée de peintures et de photos qui faisaient la publicité d'un vernissage où était inscrit le nom de Bansky en lettres irrégulières et multicolores.
Son sang ne fit qu'un tour et il se tourna vers la victime. Mais oui, voilà pourquoi son visage ne lui était pas inconnu ! C'était le célèbre et sulfureux Bansky qui était allongé là, devant lui.
Bansky, le grapheur dont on parle et que l'on ne voit jamais.
Il était là, mort devant lui. Il découvrit enfin son visage.
Nash appela d'un geste de la main un policier présent sur les lieux ,celui qui avait interrogé la femme de chambre celle-là même qui avait découvert le cadavre et appelé la police. Elle en était sûre le nom donné à la réception était celui de Morris.
Elle n'avait rien vu ni entendu.
En retournant vers le lit, Nash posa le pied sur quelque chose. Il se baissa et pris dans sa main un médiator de couleur rouge. Cet objet servait à jouer de la guitare. Il connaissait bien ce petit morceau de plastique, lui-même s'en étant servi dans sa jeunesse quand il grattait sa guitare en refaisant tous les morceaux des Beatles avec ses copains de l'époque. Il consigna l'objet dans un petit sachet plastique et tourna les talons pour se diriger vers la sortie.
Il préférait pour l'instant laisser ses collègues chercher les derniers indices. Il en avait assez vu. Il se dirigea vers le gardien afin de lui demander les enregistrements vidéo de la veille.
Clé USB en poche, Nash sortit de l'hôtel, ralluma une cigarette, traversa la rue et monta dans sa voiture.
Direction le commissariat. Là, il espérait pouvoir assembler toutes les pièces du puzzle et ainsi pouvoir avancer sur cette enquête prometteuse.
Secrètement, il jubilait de pouvoir résoudre ce crime dont la victime était célèbre et provocatrice.
Il espérait bien ainsi avoir sa promotion et sortir de ces crimes dont le visage des victimes le hantaient tous les soirs.
Nash arriva en quelques minutes au commissariat. Il grimpa quatre à quatre les escaliers et marcha d'un pas décidé jusqu'à son bureau. Il regarda sa montre qui indiquait 12:00 passé.
Même s'il n'avait rien mangé qu'une pizza froide depuis la veille au soir devant sa télé il n'avait pas faim. Il était trop excité . il sortit d'un geste la clé USB de sa poche et la glissa dans l'ordinateur. En quelques clics de souris, il était en train de visionner les images de l'hôtel et de ses clients.
Après quelques instants, il vit Bansky entrer d'un pas sûr et léger dans le hall et se diriger vers l'ascenseur accompagné du groom qui faisait glisser les bagages sur un chariot à roulettes dorées.
Puis plus rien. Seul le va-et-vient de quelques anonymes. Un vieux monsieur accompagné de son chien. Une femme l'air hautain dans un tailleur griffé, une autre à l'allure d'une prostituée qui ne resta que quelques minutes, juste le temps d'offrir un plaisir lubrique à un client de passage.
La vidéo tourna encore et encore. Puis plus rien, la nuit.
Jusqu'à ce qu'elle apparaisse telle une madone oubliée. Elle, c'est une femme, pas n'importe quelle femme, La Femme. Elle, c'est Kate Moss. Célèbre mannequin connu dans le monde entier.
Emmitouflée d'une veste de fourrure fauve, elle se dirigea en titubant vers l'ascenseur, téléphone à la main.
Puis plus rien. Une demi-heure. Une heure. Puis le matin et son va-et-vient d'employés divers de clients matinaux. Où était-elle passée ? Par où s'était-elle évaporée ?
Elle n'est ni le gabarit, ni l'étoffe d'une tueuse. Mais si ce était pas elle, qui était-ce ?
Nash courut vers l'ordinateur voisin et tapa le nom de la célèbre top model.il y trouva une adresse ainsi qu'un numéro de téléphone.
Il remit sa veste froissée et repartit à toute vitesse.
Il était maintenant 14:00 et son estomac commençait à se crisper sous l'effet de la faim.
Il alluma une cigarette et fonça vers le domicile de Kate Moss dans sa voiture. Il arriva enfin au bout d'une demi-heure dans un quartier résidentiel. Il se posta devant la porte d'un pavillon cossu et sonna. Il attendit. Fébrile, son pied tapait d'impatience sur le sol. La porte s'ouvrit. Elle faisait face devant lui, lunettes de soleil vissées sur le visage. Il entra sans attendre d'être invité, et plaqua devant ses yeux cachés par des verres noirs sa plaque d'inspecteur.
- Inspecteur Nash, police criminelle.
-Où étiez-vous hier soir entre 0:00 et 6:00 du matin ?
Pas de réponse. Nash planta son regard froid au travers des lunettes noires de la jeune femme et posa une main sur son épaule.
Elle tremblait mais restait sans réponse. Nash la poussa sans ménagement contre le mur et lui passa les menottes. Elles semblaient disproportionnées face à ses minuscules poignets.
-Mademoiselle Moss, vous êtes arrêtée pour le meurtre de M. Bansky… Tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous. Vous avez droit à un avocat.
Il la tira jusqu'à sa voiture et démarra en trombe. Un silence pesant régnait.
Arrivés au commissariat, à peine sortis de la voiture, les flashs de journalistes crépitaient déjà et les quelques mètres à franchir jusqu'à l'entrée furent difficiles à parcourir tant les journalistes faisaient barrage de leurs appareils et de leurs questions.
Une fois arrivée à la salle d'interrogatoire, la jeune top modèle regarda Nash dans les yeux et lui avoua d'un souffle la vérité.
Comment elle avait connu Bansky, comment il s'étaient aimés passionnément, comment elle  avait quitté Pete Doherty pour lui et comment celui-ci par jalousie et folie l'avait assassiné.
Nash n'avait plus qu'à prendre sa déposition, finir de regrouper les preuves qui s'emboîtaient maintenant comme les pièces d'un puzzle et d'aller arrêter  l'assassin de Bansky.
Nash en était certain maintenant. En plus de tenir son coupable il tenait désormais sa promotion.
Merci Bansky, merci Kate, et surtout merci Pete.
Fini les nuits d'insomnie.







Ma Rose nourricière


Le jardin est l’antichambre de la cuisine
Une cuisine saine, semaine et dimanche compris
Chakchouka le lundi, mijoté de carvi le mardi
Rose aux fourneaux,  Georges à la bassine.


Tous les oignons que tu as épluchés, en tablier déchiré
Mes yeux ne me font pas pleurer
Tu restes belle et je regarde tes mains malaxer les boulettes
Ma Rose tu nous régales de ta cuisine aux mille facettes.

Ta  cuisine est une cathédrale de désir
Mon jardin la source de nos plaisirs
Je cueille pour toi le persil de tes envies.

Combien de  viande hachée tu as malaxée
Mille légumes tu as épluchés
Combien de courgettes farcies m’ont nourries.