lundi 23 octobre 2017

faire le ménage

"faire le ménage"
Voilà une expression qui fait partie de moi depuis mon enfance, j'ai la sensation qu'elle occupe mon esprit et mon corps entier depuis que je suis née, normal, je suis née fille, élevée en fille, conditionnée en fille qui deviendra femme, épouse, responsable de la tenue de la maisonnée.
J'ai tenté de faire le ménage dans ma tête pour gommer cette idée mais en vain, elle est toujours là, elle a même une place dans dans mon horloge interne. On fait le ménage le matin, c'est encore vrai, maman m'a bien éduquée, alors quand arrive l'après midi , une sensation de liberté m'envahit. Je dois avouer que j'aime bien quand tout est propre, ordonné, je peux alors me poser en toute sérénité dans l'odeur fraiche retrouvée. Je peux alors rêvasser, ça on me l'avait pas inculqué, c'est arrivé après. Mais avec ce corps vieillissant, je devrais me ménager, alors, c'est décidé, je vais jeter un peu de ces objets qui encombrent mon quotidien et ne servent à rien. C'est du moins ce que je croyais. Je n'ai rien pu jeter, les objets, je les ai déplacés, je n'ai pas pu les mettre dans le sac prévu à cet effet, quand je m'approchais, ils pleuraient, criaient, vociféraient, dès que je les reposais , ils me racontaient des histoires, mes histoires, le premier cadeau des enfants, la boîte à secrets de grand mère, l'oeuf à repriser de maman, la tirelire de mon enfance, nos souvenirs de voyage, les  pensées des amis, mes livres, mes crayons, bref ils me racontaient ma vie. Je ne vais pas jeter ma vie , les bons moments qui plus est. Alors, je vais faire le ménage des mauvais épisodes dans ma tête et je vais garder" mes ramasse poussières", je vais même le regarder avec amour et respect, je ne vais plus les nettoyer à toute allure, l'esprit ailleurs, j'enlèverai la poussière dans l'idée de fixer un moment d'éternité, de fixer l instant dans la courbure d'une cruche, la transparence d'une carafe. Je serai avec eux, maintenant, présente à mon histoire.
Et finalement, le matin, c'est bien, un bon ancrage avant de poursuivre le chemin.

Ce soir, il y a

Il y a un silence rayé de bruits de crayon.
Il y a des lunettes sur des visages et sur la table.
Il y a des bustes penchés offrant des chevelures à souhait.
Il y a des bustes penchés au dessus de l' onde.
Il y a des photos vieillies par le temps
Et des passants qui captent l'instant.
Il y a des stylos et un crayon
Un crayon sorti de ma collection.
Il y a des écritures sur un tableau blanc
Il y a des dessins à la craie sur des ardoises d'antan.
Il y a un souffle de vent et une feuille qui prend son envol
Serait ce enfin l'automne?
Il y a des papiers, des cahiers, couverts de mots
De mots pour les moments où on a le coeur disant
Puis il y a les pages blanches qui attendent que se pose l'instant.

Il y a des cafetières et des verres
Tenir la nuit dans cet univers. Qui sait?

Ma nuit

"La nuit , tous les chats sont gris", le sien , il s'en moque, il est gris même en plein jour et la nuit il dort sur les pieds de sa maîtresse, au chaud, ses yeux dorés font office d'étoiles dans la chambre aux rideaux tirés. Et oui, la nuit , elle tire les rideaux occultants pour trouver le sommeil et épouser le néant. Vous l'aurez compris, la nuit n'est pas si noire qu'on le dit, il y a la lune qui joue dans les feuillages, les réverbères qui éclairent les allées, les phares des voitures, les enseignes lumineuses et parfois la cigarette d'un insomniaque dans le parc. Il parait qu'il y a aussi un monde de la nuit dans certains quartiers de la ville, celui là , elle ne le connait pas ou si peu. Elle se souvient bien de quelques rires à la sortie de bals, de quelques baisers volés après un repas bien arrosé mais ce qu'elle en connait , elle l'a découvert dans les romans policiers qu'elle a dévorés. Son monde de la nuit se résume aux bougies sur les fenêtres le 8 décembre dans la ville de son enfance.
La nuit n'est jamais tout à fait noire en ville, on éteind plus les lumières, la nature non plus, dans le noir des roches volcaniques coule la lave, dans la nuit du grand nord tombe la neige et dans la profondeur des océans brillent des poissons d'argent. Il faut aller voir les grizzlis dans leur tanière pour rencontrer la nuit. Elle aussi a longtemps cru que la nuit était noire jusqu'au jour où elle est sortie marcher dans la nuit. Là elle a vu des couleurs, elle a senti les couleurs des arbres et de la mousse, elle a découvert la douce lumière de la lune, elle a retrouvé roches et sentiers nimbés d'une clarté apaisée. Et les bruits, distincts, précis, pas de parasite. elle a écouté le brame du cerf, elle a entendu la chouette. La nuit est vivante, elle éveille les sens jusque dans le lit des amants. Et la clairière, elle n'offre pas qu'un bout de ciel mais un champ d'étoiles, un aperçu de l'univers, la nuit ouvre la porte de l'imaginaire.
Certes, il y a les nuits sans lune, les nuits noires où elle croit voir les loups, le loup qui va la dévorer, les nuits où elle a peur de tout, les nuits où les ombres indéfinies figent l'angoisse. Alors elle se souvient des danses qui célèbrent la victoire du matin, elle sait que bientôt le soleil aura rendez vous avec la lune. Elle n'assistera pas aux retrouvailles, elle n'est pas assez matinale.

samedi 21 octobre 2017

Moi, mésange célibataire.

J'ai mis des jours à trouver le bon endroit.
Finalement, j'ai choisi ce trou dans un tronc d'arbre. Je trouvais qu'il était déjà un nid, ce petit trou d'écorce douce. Et puis, il était à la croisée de trois branches, comme le symbole de la paix.
Mon mâle n'était pas vraiment d'accord avec moi. Il est suspicieux, l'oiseau!
Finalement il a cédé. De toutes façons il fallait se dépêcher.
Ensuite, il a fallu encore des jours à chercher les bonnes brindilles et à les installer une à une, dans un agencement dont nous seuls avons le secret: les courtes, flexibles et douces à l'intérieur, les longues un peu folles à l'extérieur.
Puis j'ai fini par m'installer.
J'aimais bien la vue de mon balcon.
Et tous les jours je me disais que j'avais fait le bon choix.
Ils seront en sécurité là, mes petits oeufs.
J'en ai pondu quatre. Tous beaux, tous ronds, tous blancs.
Amoureusement couvés.
Au 6° jour de couvage, je n'ai plus revu mon mâle.
Parti avec une autre? Prisonnier dans une cage? Mangé par un chat? Ecrasé contre une fenêtre?
Il a fallu que je quitte mon nid et mes oeufs pour me nourrir.
Mon nid plein.
Quelle vie, d'être mésange célibataire!
Il faut défier tous les pièges pour être sûre de revenir se coucher sur ces petits trésors.
Et le pire reste à venir!
Vous, vous pensez oisillons, c'est mignon, becs ouverts, babillages...
Moi je pense vermisseaux à trouver, nourriture, astreinte, nuits blanches, angoisses....
Dès qu'ils volent de leurs propres ailes, c'est décidé, je me trouve un autre oiseau.

Mots tirés du panier.

Faire le ménage en chantant en dansant en rêvant en s'éclatant en sanglotant en râlant en téléphonant en lisant en s'affalant sur le divan pour que maman le fasse pendant ce temps.

Le suédois est très difficile à appréhender.
C'est une langue dure qui a subi les assauts de l'hiver.

Il s'agit d'une légendaire licorne.
La mienne, fabuleuse, sur laquelle je chevauche dans la nuit de mes rêves.

Il y a

Il y a des cheveux blancs et d'autres moins.
Il y a des chaînes qui pendent en attendant le fantôme.
Il y a le gratouillis des mines sur le papier et le frottement des mains qui glissent sur les cahiers.
Il y a des éclairs de lumière dans les feuilles jaunissantes.
Il y a des lunettes qui tombent sur le nez.
il y a des mots et des mots et des mots.
Il y a des couleurs neutres sur les corps.
Il y a des yeux qui cherchent l'inspiration.
Il y a le brillant des paillettes sur la table.
Il y a des oliviers sauvages qui chuchotent dans le vent.
Il y a des bouts de bleu avec des nuages.
Il y a le silence peuplé de bruits diffus.
Il y a mon bonheur au fin fond du coeur.
Il y a mes perles qui parlent d'amour.
Il y a la sagesse qui coule dans les yeux .
Il y a les souvenirs d'une amitié perdue.
Il y a le secret des fautes inavouées.
Il y a les morts qui vivent ailleurs.
Je pense à vous.

C'est la nuit

C'est la nuit qu'elle vient me chercher.
Elle arrive, toute fraîche dans sa lueur blanche, ma licorne préférée.
D'abord je la caresse et puis je la chevauche.
Et alors elle m'emmène.
Pas de questions, pas de mots.
Juste cette tendresse dans le contact chaud de sa crinière.
Et mon regard attiré par les paillettes de son rostre torsadé.
Je voyage.
Je vais de chambre en chambre.
Je pénètre les rêves de ceux qui y dorment.
Je les transforme, ces rêves.
Je m'y incruste.
Je les badigeonne de poudre scintillante.
Je me présente à eux comme une évidence divine.
Je frôle les étoiles et elles frissonnent.
La nuit est un velours bleu profond où tout est silhouette sombre.
Ma licorne me fait aller où elle veut.
Parfois je vois la mer qui s'habille d'argent devant la lune.
Parfois je vois des branches menaçantes.
Parfois je vois l'aube à l'ouest.
Alors il faut rentrer, se remettre au lit pour qu'on ne s'aperçoive de rien.
Et ranger ma licorne sous l'armoire pour qu'elle reste mon secret.
Le secret de mes nuits vagabondes.
Le pansement de mes insomnies.
Le miel de mes angoisses nocturnes.