Lilou aux yeux de jade, couleur de son pull en mohair, et le
regard de même matière, tout doux, me raconte son réveil.
Maintenant qu’elle est à la retraite, elle a du temps. Elle
a le temps de se réveiller, lentement, en deux temps me dit-elle, chaque jour.
Elle ouvre à peine les yeux, va faire un café, s’en sert une
tasse les yeux toujours mi-clos, et retourne dans son lit pour la boire, lentement,
les yeux fermés. Elle raconte cela et ses yeux sont plissés, ses petites mains
mimant la préhension de la tasse, toute petite devant sa bouche. Elle s’en
délecte en écoutant la radio, toujours la même émission scientifique sur France
Inter. Lorsque l’émission s’arrête, elle se lève.
C’est le deuxième temps du lever. Celui-ci est plus
énergique.
Elle ouvre les volets, respire profondément l’air par la
fenêtre ouverte. Elle aime ce moment. En disant cela, elle écarte les mains et
son regard s’illumine.
Puis elle va déjeuner, pour de bon, et appelle sa maman. Il
est huit heures.
Lilou s’éveille telle une rose, qui déploie lentement ses
pétales de velours, et éclos finalement.