mardi 31 décembre 2013

Les chambres où j'ai dormi

Dans la chambre de l'hôpital. Dans une chambre d'hôtes à Londres. Dans la chambre de Léa oh la la ! Dans ma chambre tombée du lit.
Dans une tente. Dans un hôtel de Disneyland. Dans la chambre de Daphné. Dans la chambre de ma grand-mère. Dans la chambre de Noelly : oh la la quel bazar !
À la belle étoile sur la péniche. Sur  un trampoline. Dans une péniche. Dans le lit de ma grand-mère ! Oh la la ! Quel désastre !.
 Dans le London Y à Londres. Chez ma Mamie et mon papy à Marignane. Chez Marion pour son anniv oh la la ! Comme on s'est régalées ! C'était extrêmement bien.
Chez Alizée expression. Dans la chambre de mes parents. À Paris dans l'hôtel je ne sais pas où exactement. À Vars à la montagne, voilà dans un chalet.
Dans la voiture car j'ai mal au coeur. En maternelle. J'ai dormi dans une tente dans mon jardin. Dans un bateau pour aller en Corse.
Chez ma marraine. Chez mon amoureux. Chez ma grand-mère. Sur le fauteuil. Dans l'avion. Dans un hélicoptère. Dans un bateau. Dans un hôtel dans la capitale.
Sur un trampoline avec neuf personnes. Chez ma Tatie  avec mon cousin qui ronfle. À côté de mon chien. Dans une maison que je ne connais pas au Canada.
Par terre. Sur un matelas de camping. À la belle étoile sur la plage en Italie. Devant le feu. En classe verte. Au ski à Orcières.
Au chalet dans les Pyrénées. Au camping à Arcachon. Sur la dune du Pilat. Dans la chambre numéro 13 37,avec une vue sur la mer. Dans un petit lit et une grande salle de bains. Dans une chambre avec une porte automatique avec identité. Dans une chambre avec un coffre avec identité.
Sur un bateau qui s'appelle le Costa magique. Dans l'hôtel de Tunisie. Dans un hôtel de ouf. Une chambre avec deux jacuzzi. Une chambre avec une piscine extérieure.
Dans l'hôtel du Maroc. Dans une chambre d'hôtel avec cinq piscines dans tout l'hôtel, trois extérieures deux intérieures.
Dans la chambre de mon père comme il ronfle ! Dans la chambre de mon cousin. À Paris chez ma copine Anna. Dans l'Aveyron.
Dans un berceau quand j'étais petite.
Dans le TG V. Dans un aéroport sur un siège. Sur la plage. En Égypte. En Grèce. Au ski. Chez ma copine Laura.
Des millions de fois dans le lit de mon père et de ma mère.
Chez ma Mamie au Rove. À l'hôpital quand je suis née. Dans un hôtel à Las Vegas. À Miami et en Californie. J'ai campé sur un terrain. J'ai dormi dans une cabine du Corsica ferry SNCM.
J'ai dormi dans une yourte au Maroc. J'ai dormi dans un igloo en Atlantique, j'étais glacée. J'ai dormi en classe verte. J'ai dormi en camping dans un mobile home.
J'ai dormi dans un pré aux Orres. Dans la chambre de Quentin. Dans celle de mes sœurs. Chez ma mamou. Dans un tipi. À Rome. À Venise et autre part en Italie.
Au ski, au Mont D'or. Dans une cabane. À l'hôpital sur la chaise. Dans un appartement partagé à Londres. Chez  Antoine. Le jour de ma communion dans une tente.
Au Portugal. À Superdévoluy. Ma chambre à Risoul. Chez Médéric. À l'hôtel Mercure. À Serre-Chevalier. Sur le sommier rigide de mon papy.
Chez mon pote Mathieu. Chez  mon pote Hugo. Chez mon pote Lorenzo.
À l'hôpital pour mon frère qui s'était cassé le bras. Dans la piscine. Dans une cabane dans un arbre.
Chez  mes cousins de Lyon. Chez  mes cousins de Grenoble.
À Londres dans une famille d'accueil. Chez un locataire. Dans un hôtel à Paris très confortable. Sur une chaise.
Dans un camping avec mon papy qui lâchait des caisses. Sur l'herbe. Dans une maison en paille. La chambre d'hôtel repeinte « de frais ».
Au Mexique dans l'hôtel. En classe. Sur un cheval. Dans la maison en Grèce de ma Mamie. La chambre de Naïs. À l'hôpital dans les Landes.
 À Paris sur des serviettes. Sur ma mère. Dans un manoir. En Bretagne. Au Maroc dans un Riyad. À Biarritz. Dans mon jardin.
Sur mon transat. Dans la chambre de Cleo. Dans un appartement à Madrid. Dans un appartement à Lisbonne.
Notre chambre à Uzès avec le miroir aux scorpions. Chez Marion. Chez Nais. À Chamonix. À Ancelle. À la belle étoile.
Dans mon deuxième lit. Dans un bus londonien au deuxième étage. Dans un camion de pompier.
Chez ma voisine. Chez une amie. Dans la cave. Dans le Massif central. Dans une ville dont je ne connais plus le nom.
En Bretagne. Chez Noé. À Sanguiné. A Puymoisson. Au Sénégal.
Dans deux voitures.
À la Foux D'Allos. À Barcelone dans un pré. À Rome  à côté du Colisée. J'ai dormi dans la voiture, J'avais mal dormi.
Dans un bateau mouche. Au Cap d'Agde : Hérault. Dans une maison à Lure. Sur mon chat. Dans un château. Chez mes potes.
Dans une tente sur le toit de la voiture. Dans un hôtel à Darwin. Chez un ami à Brisbane . À l'île Maurice. En Guadeloupe . A l'île de la Réunion. 

En Égypte au Club Med. En Martinique dans une chambre louée.
Sur la plage en Australie. Dans un pré où il y avait des chèvres. Au Mercantour dans un gîte. À l'hôpital quand on m'a opéré des amygdales.

Dans le ventre de ma mère.



classe de CM2 .école d'Ensuès. décembre 2013. «Les chambres où j'ai dormi. »

lundi 30 décembre 2013

la bûche chochocolat

Un conte de Noël...

Assis sur la ronde dune aux chameaux dorée
Dorée, la ronde dune…
Petit écureuil contemple le ciel fourré d'étoiles
Fourré, le ciel…
Il grignote des noisettes, des amendes et des dattes grillées
Grillées, les noisettes…
Il rêve au loin là-bas du glacier de Lamapoli et de toutes ces bûches chochocolat qui poussent sur la steppe
Qui poussent, les bûches…
Au matin, petit écureuil à pas de loup part en chemins de sable et d'aurore.
Il me faut gagner le glacier de Lamapoli pour croquer la bûche de chochocolat !
Écureuil de beauté use ses petits pieds sur les routes brûlées
Ecureuil de l'amour élime sa fourrure tant de brumes il parcourt…
Un soir, assoiffé, il s'assoit sur une souche
Un virevoltant virement violet volette… (l'oiseau de paradis)
Voies mes couleurs, écureuil de douceur, et vole l'arc-en-ciel de mes plumes si tu l'oses !
Si tu le peux, alors, sans chichi, tu chiqueras,  autant de bûches chochocolat
Autant que loin tu marcheras…
Autant que plus tu mâcheras...

Quel charabia ! ?
Écureuil en restât coi !
-Quoi ? Dit Noursi , apparu sans souci par magie sur le glacier de Lamapoli, sitôt surgi.
-Qu'est-ce qu'i dit ?
-Qui dit qui ? Dit Noursi.
-Ce virement virevoltant qui volette ! Répondit écureuil coi mais  beau
-Qui dit quoi ? Dit Noursi fort surpris...
-ah ! Lui ! L'oiseau de paradis !
-Oui ! Il dit qu'il faut lui voler son violet ou tout autre…
-No souci dit Noursi à son nouvel ami.
Écureuil de beauté aux joues roses empourprées
écureuil de l'amour aux yeux bleus irisés
écureuil de merveille à la fourrure vermeille
-un petit pet c'est tout  ! dit Noursi
-un petit pet de quoi ? Répondit écureuil à l'ami
-un petou de cucu !
-Un p'tit petou de moi ?
-Un p'tit prout- prout magique au vent multicolore, tu lâches un petit vent et notre oiseau s'endort!
-Ah bon, c'est tout ?
-C'est tout bon…
Noursi au nez  noisette est assis là, à attendre le vent.
Et le vent surgit comme par magie !
Là le vent d'écureuil fuse en multicolore.
De son cu-cu  comme un coin- coin
·         prout jaune
·         couic vert
·         crac rose
·         bzz bleu
Baguette air et lumière qui fuse de mon derrière !
Hourra !
Le virevoltant virement n'en revient pas!
Le virevoltant virement en reste coi...
Oh coquin ! Mes couleurs ! Me voilà blanc !
Mon plumage de lumière est sans éclat et puis mes plumes... toutes raplapla!
Tu as gagné ta bûche chochocolat…
Sur le glacier de Lamapoli
Petit écureuil a du dépit
Me voilà tout tournebouliche
Je suis à présent plus pauvre que riche
l'ami Noursi a disparu
Avec la Grande Ourse a fondu
Car pour faire un si beau festin

Vaut mieux z'avoir un bon copain.

samedi 28 décembre 2013

la femme toupie

Elle tourne, tourne, tourne à en perdre la tête. Elle ne sait pas se déplacer autrement qu'en tournant. Pas de répit, une anomalie de la génétique. Quand elle s'assoit pour se reposer un brin, une pichenette dans les reins la propulse dans les airs, elle ne sait pas d'où elle vient, sans doute le doigt du destin et la voilà qui repart, elle tourne, elle tourne comme une toupie qui s'emballe, elle déplace l'air sur son passage. Elle a du quitter le quartier , on ne pouvait l'arrêter, une tornade dans la ville, ça fait désordre et les pompiers étaient saturés, ils ne pouvaient l'attraper.
Un jour de grand vent, elle a fini dans une forêt, s'est pris les pieds dans un lierre et devenue liane elle se balance dangereusement dans le sous bois. Elle effraie le gibier, les chasseurs sont dépités, c'est un tourbillon  qui hante la clairière.
On la prend pour une sorcière.
Elle tourne, elle tourne en écheveaux emmêlés de vert, elle habille les arbres en hiver.
Un matin de janvier, prise dans une rafale peu ordinaire, elle quitte la terre humide, déracine la plante et vogue au dessus des nuages. Le vert rencontre le bleu, elle participe à ce savant mélange , savoure les couleurs quand devant elle se dresse un portail en fer forgé aux pointes acérées et dorées. Une lourde chaîne semble défier la légèreté du cumulus sur lequel le portail est posé. Les gonds grincent, un corbeau croasse sur les passants osant pousser les battants. Elle a peur, elle veut retrouver le vert, la terre, le ciel ce n'est pas pour elle, elle tremble, elle secoue les gouttes de bleu fondues dans ses feuilles, elle veut ressentir la sève, l'humus, elle veut oublier l'arc en ciel des couleurs. Elle essaie de tourner le long de la tige, elle commence à descendre quand elle entend une clochette. Le son provient de derrière, elle défie le noir gardien des lieux, elle ose, elle pousse la grille, s'ajoute alors un son de violon soutenu par un clavecin, c'est une formation qu'elle aime bien, elle ne peut résister , elle s'avance un peu plus loin, elle est prise dans une sonate jouée par un orchestre sans chef. Des instruments en bois précieux délivrent des sons d'une pureté parfaite. Elle s'approche, les touche, les caresse, les senteurs de la forêt emplissent son être. Elle s'empare d'une flûte, porte le bec à sa bouche, souffle, les notes s'envolent, elle tourne à nouveau mais plus en tous sens, elle suit la cadence.Elle danse. Elle a apprivoisé l'air, il entre en elle et ressort en harmonie dans le bois d'ébène.
La femme toupie rebrousse chemin, le portail est grand ouvert, les feuilles volent légères , elle est libre, elle peut continuer son chemin.
Elle ne sera pas sorcière mais musicienne.

jeudi 19 décembre 2013

Une Vie


Est-ce une Fille?  , Non c'est un Garçon .
Il est tout brun ,tout mignon .
Il va grandir vite et devenir ce beau jeune -homme, nomade qui parcours le monde ,
Pour découvrir et donner ce qu'il sait déjà , ce qu'il apprendra au long de ses pérégrinations .
Apres une halte chez les Boudistes,il arrive dans l'empire du milieu, et reprend ses études de médecin aux pieds nus .
 Les plantes,les minéraux,les massages,l'acupuncture n'ont plus de secret pour lui .
Il se lance sur la route des épices, de la Soie rechercher de son Soi en Soignant les autres .
Qui va-t-il rencontrer au bout du chemin  ? Peut-être Lui , peut-être moi ? ou quoi ?

mardi 17 décembre 2013

L'aveu


Amour te souviens-tu de cette belle nuit d’été
Tu m’avais dit « ce soir, nous nous enivrerons »
A la chaleur si douce, tu avais ajouté
Un anneau de Moebius, un peu d’éternité
Le rosé était frais, et nous nous enivrons
Les étoiles palpitent, sourient, attendent
Quelques lignes d’un livre que tu m’avais donné
Et qui disaient l’histoire d’eux qui se sont aimés
Pourtant, tu es parti mais là au bout des doigts
La chaleur de ta nuque s’attarde au creux de moi
L’anneau de Moebius jaune pissenlit et blanc
Est toujours dans mon sac pour un prochain tourment
Car, sans te l’avouer, je me l’étais promis
Si je me réveillais, un soir, nous rejouerions
Nos mains cherchant les mots, nos peaux la mélodie
Nous trouverions la note bleue, l’accord parfait
Avec toi seul l’instant a goût d’éternité
Mais souvent, aujourd’hui, épuisée, en silence
Je caresse l’enfant de cet instant magique
Enfant qui ne fut pas et ne sera jamais
Il est joli et frais, à l’abri du tragique
Un fruit acide et doux du destin capricieux
Qui a dit : «  jamais plus » et qui sourit : « trop tard »
Pour la rime à l’aveu j’ajoute : « désespoir »


Dans l'immensité de l'Océan," la fille aux quatre rangées de dents pointues"  nageait entre deux eaux, elle regardait de ses trois yeux jaunes les petits poissons multicolores qui frôlaient son dos juvénile.
Quand ,tout à coup, un grand espadon aux écailles grises et vertes fonça sur elle, elle sourit, puis ouvrit son énorme bouche pour dévorer le ventre écaillé de l'animal, le sang gicla et se dilua dans la mer .
Les petits poissons multicolores dansaient dans ce mélange de sang et d'eau .
Le soleil parvint à percer la profondeur de l'Océan, il irradiait le rouge sanglant .
"La fille aux quatre rangées de dents" continua à nager , les algues brunes se collèrent à ses dents acérées comme des dentelles de lianes .
Les petits poissons multicolores l'escortèrent jusqu'à l'ile paradisiaque où "l'enfant ensablé" l'attendait pour lui faire un" câlin collant" 

lundi 16 décembre 2013



Marie-Pierre , fille de Rien , née aux quatre autre vents ,
Eripiram , Ou est ton âme ?
Marie-Pierre, fille de Rien , brule au soleil du Sud
Eripiram, perdue dans les brumes du Nord
Mapie se réveille en Provence , comme une pomme rouge,elle roule sur la terre brune,et,
 s'élance vers le profond de la mer bleue .
Marie-Pierre , fille de Rien donne vie à Quatre rejetons
Mapie pour les Six petits qui grandissent trop vite !
Marie Kephas ,que fais-tu de tes pierres ?
Pierre-Marie , changes-tu de Sexe ?
Marie-Pierre, fille de Rien, profites d'aujourd'hui ,
Ecris sur ta page blanche des élucubrations" Patriquestes "
Arraches-toi les cheveux ,c'est dur, difficile, mais, tu y arriveras
A quoi?
A l'inconnue à  2X enfin : XY+2X = fille de RIEN
Marie-Pierre ,fille de Rien ,au centre du cercle ,rayon TT R de couleurs brille dans la nuit .

vendredi 13 décembre 2013

Grandir


Naissance de Francine la petite au gros de l'été. La layette de Francine la petite trempant encore dans la lessive. Rien pour l'habiller. Les premiers pas, prudents, de Francine la petite à un age fort avancé.
Francine la petite sans son frère.
Francine la petite sautant à cloche-pied sur le trottoir. Un jeu de marelle dessiné à la craie.
Dans la salle de gym, Francine la grande bien empotée. Un corps devenu d'un coup trop grand pour le mouvoir facilement.
Francine la grande tirant la langue devant d'interminables versions latines.
Francine la grande séchant les cours de latin, la signature des parents reproduite avec minutie.
Le pouce tout déformé de Francine la petite tant il a été sucé. Les noeuds dans la tignasse frisée de Francine la petite, un peigne ravageur, des cris, des pleurs, mais pas de poux, jamais. Ouf!
Les deux enfants de Francine la grande, un grand, un petit.
Couchée sous les étoiles, s'en appropriant une, qui brille pour elle seule encore aujourd'hui.
Francine la grande redeviendra-t-elle bientôt petite sous le poids des ans?
Francine la grande debout, couchée,assise, à genoux, accroupie. Les membres sans repos de Francine la grande.
Francine la petite imaginant le chemin à venir.
Francine la grande contemplant le chemin parcouru.
Francine la petite, Francine la grande, vraiment, est-ce la même?

lundi 9 décembre 2013

prise d'otages

Onze otages sont kidnappés : six femmes ,cinq hommes dont un bébé , dans le désert volcanique où la pierre noire ressemble aux roches du Stromboli ; les araignées géantes qui ont terrifié Fiodor Dostoïevski ,que Louise Bourgeois sculptait avec volupté , effraient les 11 otages qui n'ont qu'un morceau de sucre à se partager.
Une mouche est venue mourir à leurs pieds ,vont-ils la manger  ?  La faim les taraude , ils ne peuvent même pas acheter quoique ce soit. En effet, ils n'ont que 3 punaises et 200 Ariarys.
Deux élastiques serviront à lancer des morceaux de miroir pour signaler leur présence prisonnière à des camions lointains.
Ce pays est abominable ,les hommes sont sans tête,les femmes agrafent et pincent les  hommes qu'elles tuent sauvagement .
Que vont devenir les Onze otages?
Déjà l'un d'entre eux a eu la tête coupée par les cruelles femmes géantes .
Ils ne pourront que pleurer et perdre ainsi nos cils .
Il reste dix otages ,vont-ils être sauvés ?

dimanche 8 décembre 2013

le dé

Le dé, le lancer, le faire rouler, un dé c'est fait pour ça! Un dé pour jouer son destin. Mais parfois, le destin est bien laid alors on triche, on garde le six, on le tient serré, on l'empêche de tourner, on le porte à bout de bras, parfois il en devient lourd, pourtant il permet de rejouer!
Et pourquoi pas le lâcher et
Ainsi soit il!

La Corneille

La Corneille, elle est veuve depuis vingt ans et n'a jamais quitté les vêtements qu'elle portait le jour de l'enterrement. On peut la voir dès sept heures du matin dans son jardin, elle commence par se signer en regardant le clocher puis elle retrousse ses manches et bine les rangs de tomates, elle adore les tomates, elle en est au troisième pied quand elle sort une patate.Que diable vient faire une patate dans une ligne de tomates!Elle la ramasse, elle est creuse!Mangée par un doryphore?Pas du tout, une patate vidée avec soin, au milieu, un parchemin! La Corneille déplie le précieux papier d'une main calleuse et découvre une photo accompagnée d'une invitation, un rendez vous en quelque sorte, un rendez vous dans ce qui semble être un café. Elle n'a jamais mis les pieds dans un café, excepté celui du village le jour des obsèques de son Polo. Pour la première fois depuis vingt ans, elle abandonne le jardin au petit matin et se rend au bureau de poste. Les rideaux se soulèvent sur son passage.Elle demande à l'opératrice le numéro inscrit sur le message de la patate. Intriguée l'employée épie la conversation:
"Oui, c'est bien le bar des oiseaux."
"De tous les oiseaux, pas uniquement un bar pour les beaux oiseaux, pour les ramages et plumages des livres de bibliothèques. Vous savez , je suis toute noire, je suis La Corneille."
"Bienvenue La Corneille, nous vous attendons, il s'agit d'une convocation pour la réunion des oiseaux, nous organisons la nouvelle saison. On choisit les brindilles pour les nids, on trie les graines pour rassasier chacun de nous, on s'entraine pour lancer nos trilles au printemps, on échange les bonnes adresses pour passer l'hiver, on améliore la vie de la communauté en se lissant les plumes, Nous aurons bien besoin de vous La Corneille!"
Dès le lendemain, La Corneille met son chapeau décoré de coquelicots et prend le car pour Chanteperdrix.
On ne la revit plus au village, elle ne sème plus de graines esseulée dans son potager, elle les cuisine avec du beurre, les amalgame en boulettes, les presse dans des filets qu'elle dépose dans les arbres dénudés des jardins citadins. On la reconnait encore, elle est toujours noire mais autour d'elle volent des oiseaux multicolores et sur son épaule se tient une colombe blanche, elle ne s'envole pas à tire d'aile, elle reste avec elle.

vendredi 6 décembre 2013

Lui et Moi



 Lui et Moi

Nos balades dans les boutiques de fringues – même pas pour moi, mais pour toi qui ne trouvais pas ta taille, pas ton style, aux U.S.A., disais-tu.

Bruxelles, Avenue Louise – tes taquineries auprès des vendeuses, tes questions sur les matières.
Je touchais les tissus, humais les odeurs de la moquette au plafond comme on hume l’air de la campagne, de l’humus de la mousse aux parfums des fleurs et de la sève des arbres.

Tes essayages de pantalons avec plein de poches. Tu en avais besoin dans ton travail et je t’imaginais courant côté cour et côté jardin pour mettre en place les comédiens, un détail du décor, déposant tes lunettes, sortant ton stylo.

Tes blousons aussi, taille XXL sans doute – des kakis de toutes sortes sur les imprimés. Tu n’étais pourtant pas dans l’armée. Et je hume le parfum des vendeuses. Et je sens le sien, délicat, exquis. Subitement, je me pose la question : quel est-il ?

Comédien, que tu la jouais cool ! Quel divertissement j’avais avec toi à ces moments de partage, d’échanges, juste ponctués par des « Comment trouves-tu, Anne-Marie ? » Ton rire, quand tu me trouvais juste indécise : quelle douce mélodie.

Essayages. Changement de style. Tu revenais toujours au tien : chic et décontracté à la fois. Toujours chaleureux et drôle :  tout ce que j’aime !

Les vendeuses se dérident. Avenue Louise, ce n’est pas évident. Elles sont un peu coïncées, ces demoiselles, avant que tu sortes ta Visa ou American Express.
Alors l’air semble beaucoup plus léger. Les portes s’ouvrent. L’air frais pénètre et nous prévient de remonter nos cols.

Balade dans les rues. Rien ne t’échappe. Tu as l’œil du metteur-en-scène. C’est cocasse. Toutes les scènes de la vie sont drôles.


 Une femme qui retourne à sa voiture parce qu’elle a oublié quelque chose : tu en fais une scène parodiant Pagnol. C’est d’autant plus cocasse que tu es Belge, de Liège, et que tu n’as aucun accent – surtout pas celui du Midi. Mais tes mots sont là pour le décrire.

Juste un peu sarcastique parfois, sans méchanceté aucune.

La cigarette, un peu, très peu. L’odeur de ses Craven, envoûtante – ses doigts autour, dégageant force et sensualité tout à la fois.

Les attentions, beaucoup, vraiment beaucoup.
En riant, il me disait : « Bon, on va se détendre dans un café. »
Boire juste ce qu’il faut : un thé avec moi.

Odeurs de bières, mais juste ce qu’il faut aussi. Le café n’est pas enfumé. C’était avant l’interdiction de fumer dans les lieux publics. Mais ici, ça va. Il fait chaud. L’atmosphère n’est pas pesante. On peut discuter et s’entendre suffisamment pour qu’il puisse me raconter son prochain spectacle.

L’écriture, souvent, sur un petit carnet minuscule où tu notes aussi des petites choses.
Cerveau en ébullition.
Tes idées sont là et tu te prépares à de grandes œuvres :
Cinéma, théatre, comédies musicales.

Te connaître.
Oui. Quelle chance j’ai.




La peau
 La peau…
Douce et satinée comme du velours de soie
La peau…
A son odeur particulière parfois changeante
La peau…
Contre laquelle on s'abandonne, contre laquelle on se donne
La peau…
On la caresse, on la goûte…du bout de ses doigts, du bout de sa langue
La peau…
On se mélange, on se consume, on s'échange
Contre la peau…
On s'y abrite, en s'y accroche, on s'y endort
Peau contre peau…
On s'embrasse, en s'enlace, on se perd, on se trouve
La peau…
Ta peau…

T'avoir dans ma peau

Heureux ceux qui ...

 Un essai ... Merci Pierre
Anne-Marie



Heureux ceux qui …


Heureux ceux qui respectent
Mes mains décharnées et mes pieds déformés.

Heureux ceux qui conversent avec moi
Bien que j’aie désormais quelque peine
A entendre leurs paroles.

Heureux ceux qui comprennent
Que mes yeux commencent à s’embrumer
Et mes idées à s’embrouiller.

Heureux ceux qui,
En perdant du temps à bavarder avec moi,
Gardent le sourire.

Heureux ceux qui jamais ne me font observer :
« C’est la troisième fois que
Vous me racontez cette histoire ! »

Heureux ceux qui m’assurent qu’ils m’aiment
Et que je suis encore bonne
Ou bon à quelque chose.

Heureux ceux qui m’aident à vivre
L’automne de ma vie…

(Auteur : Saint Vincent de Paul)



groupe de valensole, manosque

on est train de se faire suer à chercher la connexion, mais on va y arriver!

La chambre de la morte.

Le gond de la porte d'entrée par la cuisine était crispé par le gel.
Ce bruit sec de verre brisé quand je suis entrée.
La grande pièce est à peine tiède et cette odeur de bois, de soupe et de fumée froide.
J'ai appelé…
Le silence me répond et la grande pendule qui sonne le quart.
Son éclat qui résonne dans le couloir obscur.
La porte de la chambre entrouverte diffuse un rayon de lumière oblique.
Après que les soldats aient déserté la ferme, j'étais restée cachée pendant quelques jours…
La grand-mère a encore de la soupe et du bois, je me suis dit, je ne voulais pas y penser, sauver ma peau, seulement...
J'étais murée en moi-même des jours sans plus savoir.
Dehors le bruit seul du vent et les traces effacées dans la neige ont eu raison de ma terreur
alors, je suis sortie
la chambre est plongée dans le silence.
L'armoire regarde le lit. Yvonne est couchée bien haut. L'édredon rouge lissé sur son corps ample. Le tic-tac de la pendule imprime un battement. Mais nul souffle ne s'échappe. Le vieil inhalateur exhale des relents de camphre froid. Les mains d'Yvonne sont rangées. L'alliance à son doigt émet un rayon dans le calme écrasant de la chambre.
Par la fenêtre, le vent valse avec les flocons et c'est une  danse de solitude, d'abandon et d'oubli.
Il y eut, la voix du soldat et le claquement de ses talons et les boutons dorés de son habit
comme à la parade
dans cette masure de peu,
la vieille
lui
et moi
ma robe de laine
l'éclat de mes boucles, il a dit.
Et la grand-mère courbée ainsi tant, qu'a ne plus même élever le regard
le feu encore là crépitait dans l'âtre
la beauté de mes mains, il souligne,
et ma poitrine trop haute
et Yvonne qui halète, ce sifflement de bronches.
Je l'ai aidée jusqu'à son lit
ne me laisse pas, elle a dit,
le rouge si beau à mon front si lisse
il a vu,
j'ai recouvert la vieille, chaudement, ôté ses bas et rangé au pied bien droites ses pantoufles
pendant qu'il attendait
la soupe et son flot de bouillon
Yvonne caressait sa chaîne à son cou et lissait le petit cœur d'or pendu comme on fait d'un enfant, tremblante
ne me laisse pas, elle a dit ...
j'ai repoussé la porte et posé la chaise
bien droite devant le lit,
dors, j'ai dit, je veillerai cette nuit, sur ma chaise, là, dort…
J'ai refermé la porte sur le tic-tac et la colère du vent.
Le soldat était haut et droit et sa nuque en oblique.
De la soupe, encore le flot et jusqu'à la tempête
et de la nuit
et du tumulte
et de mon corps courbé, lassé, harassé, assiégé…
Après, j'ai couru dans le vent glacé de l'oubli.
Après que les soldats aient déserté la ferme, je suis revenue.
Dans la chambre, sur la chaise elle avait posé l'écharpe et le sac à main comme elle faisait quand elle allait sortir  . Et aussi l'eau de Cologne, ce jus vert dans la pauvre lumière de la lampe, la bouteille oubliée là, ouverte.
J'entends les dix coups de la nuit et je scrute ses battements sur les draps fleuris,
ces champs d'été qui recouvrent les seins lourds de la vieille.
Je voudrais y croire
je retiens ma respiration pour mieux les entendre,
mais, rien ne bouge ni ne palpite
alors dehors le vent et les flocons en sarabande
je sais bien que je suis seule, là
tout cela n'est sans doute pas arrivé par hasard
depuis longtemps la soupe est devenue mer morte
et le poêle ni ne ronronne ni ne miaule
l'oubli a dévoré la plaine l'hiver a recouvert les cris
et je suis bien petite
et bien seule, là, avec cette morte
et que devient le blanc quand la neige a fondu…



jeudi 5 décembre 2013

Explorations

Il se rappelait des moments où ses cils touchaient les siens, où ses cils touchaient ses seins, et de sa peau. Il se rappelait de ces moments où ses cils se joignaient, et des ces baisées qui papillonnaient autours de son nez et de sa joue. Il se rappelait de ses cils qui battaient contre les siens, qui le chatouillaient, des élastiques de tout bord, qu'il fallait dégrafer.Et maintenant c'était l'automne, et ses cils tombaient un à un, comme les feuilles d'un vieil érable.
Il n'en avait plus qu'un, de cil, sur le bord d'une feuille blanche, qui l'accompagnait, un cil qu'il prenait de temps en temps, sous son index, en mouillant sa peau. Il le regardait trembler sous son doigt. Puis il reprenait son travail, courbé au dessus de sa page. Il y avait une odeur pas loin. Le reste de quelque chose de son corps à elle, qui s'évanouissait, avec les pages des livres, avec les papiers griffonnés, et les courses punaisés sur le bureau. Sur des élastiques, l'odeur de ses cheveux subsistait, et quelques cils, de ces cils qui s'enfoncent dans la gorge bien chaude, et qui vous sillonne la peau, avec l'odeur chaude et légère de ces après midi passés ensemble, peau contre peau. Sur la liste des courses, écrit au crayon gris: acheter une plaque de beurre, des cotons tiges, et des cheepsters. Par moment sa fille, toute coquette et guillerette, passe derrière son dos pour prendre une douche comme un coup de vent: à plusse papa. A plusse ma chérie. Et les heures qui s'étirent dans le compagnonnage de son souffle et de la nuit. Son odeur qui renvient. Il parait que quand on est très vieux et qu'on perd la boule, la dernière chose dont on se souvient, c'est les odeurs de sa vie passée, les odeurs, c'est rien que ça, qui nous reste quand on perd la boule. Lui quand il perdra la boule, qu'il sera sur son lit à observer le plafond, il se souviendra de cette odeur de femme qu'il respirait dans des vêtements. Lui, quand il ne se souviendra plus du nom de son fils, il se souviendra du parfum de cette femme, un jour, c'était un jour de décembre, de cette femme qu'il a aimé. Et maintenant, quelque part dans l'embrasure d'une porte, avec pas loin le bruit du frigo et un rayon qui tombe sur ses cheveux, il se souvient qu'il lui avait dit: surtout ne fait rien à tes cheveux, je les aimes comme ça. Elle lui avait dit tu crois?Il lui avait dit oui, je les aime bien comme ça. tu les aimes ou tu les aimes bien? Je les aime bien, et il avait souri.
Tu n'es pas tombé amoureux de ma coiffure, j’espère.
non, mais je les aime bien.
Pendant un moment, elle n'avait rien dit, puis elle avait fini par lui répondre
Moi, je les trouve moche
ne dis pas ça, il sont très beau tes cheveux
tu dis ça parce que tu veux être gentil, tu veux un morceau de sucre?
Il avait paru étonné, puis très vite, il avait comprit: elle était devant lui avec un petit morceau de sucre qui sifflait comme une buche chaude entre ses dents. Alors il avait comprit, il avait comprit que c'était le signal.

Maintenant qu'elle n'est plus là, il est toujours avec un petit morceau de sucre entre ses dents. L'odeur sucré de sa langue et des grains de sucre éparpillés. Maintenant, le bureau et les fiches à épingler, une punaise. Par moment, un cil qui lui revient, un cil, comme un petit bout de lune argenté.

mardi 3 décembre 2013

Tchat funèbre


Sur Facebook, en deux mille vingt et quelques:

Ami n° 28: Francine L. tu dis? Au lycée de Beauvais en même temps que nous? Tu es sûre? Elle avait eu son bac en 65? Aucun souvenir, mais alors, aucun souvenir!

Amie n° 301: Je ne peux pas t'envoyer sa photo, sur son mur elle avait mis une fleur, un tournesol.

Amie n° 125: Oui, elle aimait se cacher, elle ne se faisait pas remarquer. Moi je me souviens qu'elle n'avait pas de petit ami, ça m'étonnait, elle était pas mal.

Ami n° 32: Oh; mesdames, moi je m'en souviens. J'étais à côté d'elle en cours de maths. J'étais nul. Elle me laissait pomper, comme ça, en silence. Ce n'était pas un accord entre nous, elle ne demandait rien en retour, elle orientait juste un peu sa feuille vers moi.

Amie n° 4: Et bien moi, je suis sa cousine, sa "petite "cousine. Elle me l'a assez répété que j'étais "petite", six ans de moins qu'elle. A l'époque on n'était pas riches, sa mère me refilait toutes ses frusques devenues trop courtes. J'enrageais, mais je les mettais, je n'avais pas le choix. Aussi, à défaut de photo d'elle, je peux vous envoyer une photo de sa robe écossaise, taille 12 ans, que j'ai portée jusqu'en 1965.

Amie n°3: Permettez moi de m'immiscer dans le tchat. Je suis sa fille et je vous assure que comme mère, avec tout l'amour que je lui porte, elle ne passait pas inaperçue. Dans les réunions de parents d'élèves elle était la première à prendre la parole, à revendiquer pour nous des heures de sport en plus, ou des sorties, ou un remplaçant en dessin. Moi j'avais honte, mais honte...
Sur Facebook elle était beaucoup plus discrète, vous ignorez sans doute tout d'elle, mais moi, au quotidien...
Enfin je crois qu'elle a mené la vie qu'elle voulait, elle nous a quittés à temps, avant la déchéance qu'elle n'aurait pas supportée.

Amie n° 30: Et un mari, elle avait un mari? On n'en a jamais entendu parler.

Amie n° 3: Mon père, il faut bien avouer qu'il n'avait pas grand chose à dire. Maintenant il s'en fout, sur ses vieux jours il a trouvé une femme beaucoup plus coulante.

Amie n° 28: Et les obsèques, vous y êtes allés, vous aux obsèques?

Amie n° 3: Pas d'obsèques, ma mère n'en voulait pas. Elle est partie en Afrique, s'est assise au bord du fleuve et a attendu qu'un crocodile la dévore.

lundi 2 décembre 2013

Hôtel à Vienne



Mr. Alshut inscrit son dernier client de la journée. Hôtel complet. Cette pancarte qu'il dépose sur son guichet déclenche chez lui un large sourire qui n'a d'égal que la largeur de son porte feuilles aux soufflets bien remplis. C'est le seul sourire qu'on lui connaisse, d'ordinaire on ne voit  de lui que son crâne dégarni tant il est affairé dans ses papiers. En se hissant sur la pointe des pieds, il observe le va et vient des touristes. Par dessus ses petites lunettes rondes , rien ne lui échappe. Il envie les couples d'amoureux, les couples de vieux venant fêter un anniversaire de mariage au son des valses de Strauss. Il éprouve une certaine nostalgie devant les robes longues semblant tout droit sorties des boiseries. En effet , tout est recouvert de bois ciré décoré de portraits d'on ne sait quelle famille, des ancêtres de Mr. Alshut sans doute ou des croûtes achetées aux puces pour faire semblant d'être descendant de grande dynastie, on est à Vienne tout de même! Seule brille la boule en cristal de la montée d'escaliers, bien astiquée , elle reflète les bijoux de dames huppées se prenant pour Sissi. Des parfums sirupeux envahissent les couloirs et vous montent à la tête, prémices de fin de bal. Des airs de violon surannés accompagnent le petit déjeuner. Mais une fois ce flot évacué après multiples courbettes, le service est réservé aux locataires de longue durée. Ils sont logés dans les mansardes de l'établissement auxquelles on accède après avoir parcouru un dédale de couloir où trainent des odeurs de tabac. Il y a là un étudiant en peinture qui chaque matin tente d'engager la conversation sur Hundertwasser mais Mr. Alshut n'y connait rien, puis arrive la dame au petit chien, elle ne dit rien, elle essuie une larme en beurrant ses tartines, on dirait qu'elle attend, qui quoi, un amant disparu? une amie qui ne vient plus? on ne sait pas. Elle est là. Quand le grand escogriffe à peine coiffé débarque pour boire son thé, Mr. Alshut se fait encore plus petit derrière son guichet, il a peur de ce client, ses yeux rouges et ses taches de rousseur l'épouvantent .Il le prend pour un espion et lui prête toutes sortes d'intentions:"il prépare un attentat, il va vérifier mes comptes, me dénoncer au fisc...."Mr. Alshut regrette ses quelques irrégularités et cache ses cahiers. Et quand l'inconnu se met à pianoter sur la table, il claque des dents de frayeur et devient tout blanc. Il guette avec impatience le moment où la chaise va grincer sur le plancher pour signaler le départ de l'étranger. Après avoir lisser ses fines moustaches, l'individu enfile un imperméable élimé, se saisit de la sacoche de cuir usé dont il ne sépare jamais et d'un geste agacé pousse la porte, tousse, remonte son col et le voilà dehors. A demi rassuré Mr. Alshut peut remonter l'escalier, s'arrêter devant la porte opus. A l'abri des regards, il tourne doucement la clef et pénètre discrètement dans la chambre. Il entreprend une fouille minutieuse des meubles, il en connait tous les recoins, ils proviennent d'un héritage lointain. Il tire tous les tiroirs, ouvre toutes les armoires. Rien. Pas étonnant que l'occupant sente le moisi, la garde robe est limitée. Avant de quitter les lieux, Mr. Alshut repense au réduit, attenant à la pièce, un petit passage qui permet d'accéder au balcon sur lequel plus personne ne va. Et là, il découvre un coffre:" J'avais raison, c'est un voleur, il cache ses trésors, il dépouille mes clients, je devrais fermer , appeler les policiers..." Mr. Alshut s'éponge le front , soulève le couvercle et stupeur! Des partitions, des partitions de Schubert. "Enfin un qui vient pour le maître, un qui ne vient pas valser, un qui vient pour le meilleur de Vienne, je vais lui montrer le buste dans la jardin, je vais le conduire au petit musée, je vais lui indiquer les bons concerts, les scubertiades.....
Mr. Alshut exulte, je vais appeler mon hôtel "Hôtel Schubert" La classe! Des larmes coulent sur les lunettes, des lunettes comme celles de Schubert.

dimanche 1 décembre 2013

Hôtel de l'énigme

"Hôtel de l'énigme" : je ne connais pas d'hôtel sous ce nom-là, et pourtant ça sonnerait bien, à condition de pas y dormir peut-être. En général, les noms d'hôtel, ça craint:
- Hôtel des Voyageurs (qu'est-ce que c'est original dîtes-moi, vous avez trouvé le nom comment?),
- Hôtel de la Gare (ah oui, c'est sûr, comme ça c'est pas dur à trouver),
- Hôtel de France (Oh yes, the French touch of course! My GPS is rich!)
etc.

    Quand je voyage pour moi, j'évite ce genre d'endroit : souvent trop cher, sauf quand c'est ma boîte qui me paie cette boîte à sommeil. Mais là je ne choisis ni l'hôtel, ni son nom, et d'ailleurs il est rarement en français, alors... Ces maisons de passage ne me racontent en général pas grand'chose. Néons criards quand bon marché, lumière tamisée quand plus aisé. Il faut donc les toiser longuement, prêter l'oreille, désoeuvré ou pas, mais une oreille qui parle souvent d' une autre langue, d' un autre accent, d'une autre musique de mots. Sinon je fuis ce voyageur qui me ressemble trop, pas le temps du monologue démagogue.

     Une hôtesse russe dans une banlieue hollandaise te salue sans humeur vagabonde devant son écran?
    Un groom immense comme un Turc de légende, portant chapeau-clac et redingote entre 2 narghilés?
    Un assoupi des clés, qui garde un oeil vissé sur Al Jazeera, en arabe dans le texte, et te signifie qu'il t' a repéré quand tes mains sortent autre chose qu'une carte AmEx? Et pourtant, ces billets en devises pourris qui te donnent un instant l'illusion que tu es quelqu'un de puissant, t'as pas vraiment envie de les garder longtemps par devers toi, si sales et si puants si souvent...
    Que dire à cette femme de chambre, craintive et demi-muette, qui semble ne voir du voyage que les penchants des hommes qui ne resteront pas?
    Comment faire, dans ce hall de gare privée, qui héberge les petit-déjeuners de la planète entière en mode open bar mais lève-toi pour ton café ?

     Et puis parfois un hôtel c'est un autre froid, où l'on entre en glissant, dès le perron, sa carte de paiement. Un 24/7 où personne ne vous attend, personne ne vous répond, personne ne vous réveille, personne ne vous salue, personne ne vous sourit, personne ne vous appelle un taxi, personne ne vous montre que vous êtes en mouvement, en marche, en vie. Alors ces déserts en ville, on les fuit, et, selon l'envie, on ose, on sort, on prie pour qu'enfin une personne vous sourit, vous salue, ou mieux, vous questionne et vous raconte sa vie. Ou d'autres vies.
    On prend alors le risque de la nuit, et le souci de quelqu'un qui vous suit. Ou la lueur du sourire d' une jolie fille, alanguie devant un mur de verre et vapeur au coin d'une rue; elle s'ennuie, alors elle accepte de vous traduire la carte que le serveur nonchalant mais narquois vous a claquée sous le nez, idéogrammes improprement manuscrits.Tout ce petit monde rit, les yeux bridés se plissent encore plus un instant. L'énigme du plat se résorbe, cette fois dans l' estomac. Il faudra rentrer, réchauffé, et au Diable la note de frais pour le comptable sourcilleux du besogneux bureau d'à côté, de la Société Anonyme qui finira bien par raquer, au taux de change qui l'arrange, ça va sans dire...
    Pour l' heure direction l'hôtel. Il n'y a guère qu'en Estonie que taxi s'écrit taxo. On rentre le plus tard possible, sans faire de bruit, on reparcourt ces couloirs morts et sans repères, on imagine des temps prochains où même les hôtels redeviendont humains. Après l'électricité?

3 (auto) portraits d' extra-terrestres

1)
             Ce prétendu visage n'a pas d'yeux. Pas besoin, il est Dieu.
Il voit tout. Au dehors comme au dedans, en avant comme en arrière, le dessus comme le dessous, les desseins comme les destins.
Sans traits reconnaissables, il est lui-même et il est les autres.
Egal et différent.


2)
             Monsieur Cagoulot rentre de plongée sous-marine. Il est vrai qu'il a bu, et pas que de l'eau de mer. Mais ce soir c'est ... Allowine! Et c'est lui, tout crado, la peau comme les vêtements, qui pouire, et va faire fuir les minots, "qui disent jamais bonjour sauf pour me taper des bonbons une fois l'an". Facile, Monsieur Cagoulot a ce talent, et pas qu'un jour par an.

3)
             03 vit ailleurs, cheers humains bien d'ici, mais IlElle ne se voit que la nuit. IlElle descend de Chiron, porté par le vent solaire. IlElle vient chercher de l'aide, elle-lui le shamane : son peuple l'attend et l'espère. Et IlElle se désespère. Toute cette lumière sur la Terre, elle paraissait pourtant bien bleue depuis là-bas, depuis l'au-delà de la stratosphère. Les cartomanciens se seraient-ils trompés? Impossible. Alors IlElle les a cru, a dit oui, sans savoir, et IlElle quête, et se cache. Parfois une douce couleur amie lui parvient, au moment où les aurores boréales laissent leur place au soleil, dos à la nuit, comme un sourire qui luit, vers ElleLui, plus serein que Sélène pour les humains.
            Alors IlElle devient Zoreil, Zorro du soleil. IlElle erre alors dans l'air d'une ère amère sur terre, l'air de rien, l'air trop fin brûle sa gorge, car son peuple jamais n'en eut besoin. Il erre, et erre encore, IlElle le sait, ça ne rime à rien, mais il le fallait bien. Sourire néanmoins, sourire au lointain... 

vendredi 29 novembre 2013

Phobie hotelière


Chacun ses fantasmes, chacun ses phobies, enfin elle le croit, pour se rassurer. Elle n'aime pas les chambres d'hotel. Elle les évite. Longtemps, elle n'a pas pu dormir dans une chambre d'hotel, alors elle se tournait et retournait dans ce lit qui décidément ne lui convenait pas. Elle dort n'importe où, par terre dans un couloir, sous une tente ou à la belle étoile, chez elle peu importe la pièce,même dans la cuisine ou dans la baignoire s'il le faut, dans sa voiture, mais c'est "sa" voiture.
Dans un lit d'hotel, si elle s'abandonne un peu, si elle laisse la place aux images qui se présentent, elle se sent assaillie, envahie, par tous les gens qui ont dormi là, exactement là, à sa place de ce soir. Ils ont laissé des traces, ce trou de cigarette sur la table de nuit, cette écorchure dans le papier peint, cette tache ineffaçable sur le couvre-lit, une odeur, un parfum, un relent de tabac. Rien, mais elle sent tout et si elle se laisse faire la panique l'envahit. Des visages, maquillés ou barbus, des corps lourds et suants ou secs et nerveux, des gestes, des paroles, des mots d'amour ou de dispute. Un meurtre peut-être un jour, va savoir, elle n'a pas lu tous les journaux.
Imaginer que là, à sa place, dans le cocon que devrait être sa chambre d'un soir, se sont succédés tant de personnages, tant de sentiments, tant de présences abandonnées au sommeil, la terrifie.
Des gens qui, dans la rue, ne lui adresseraient jamais la parole, avec qui elle ne partage rien, pas une bribe de connaissance. Et elle doit prendre leur place dans ce qu'il y a de plus intime, un lit.
Elle sait qu'elle pourrait en rêver, que ce serait prétexte à une imagination débridée, qu'elle pourrait se relever, écrire, faire des portraits, mais maintenant à l'hotel, elle l'avoue, elle prend un somnifère.

mercredi 27 novembre 2013

Je me souviens...

Je me souviens de beaucoup de choses; de beaux souvenirs d'école. Je me souviens de la bonne odeur des croissants qui flottait dans l'air et venait de la boulangerie ,les matins,sur le chemin du collège...  Je me souviens de peu de choses d'un coup; tout est parti comme un nuage fuyant le soleil... enfin pas tout à fait tout. Je me souviens des dimanches après-midi, où nous pique-niquions sur notre belle nappe rouge quadrillée dans l'herbe verte. Je me souviens de lointains et vagues souvenirs comme quelques bêtises d'enfants où nous sonnions  à la porte des voisins, et nous cachions la seconde d'après dans les buissons d'à côté. Oui... je me souviens de moments qui ne sont devenus un heureux souvenir que lorsque je me suis rendue compte que ces instants-là étaient uniques, et que je ne pourrai jamais les revivre de la même façon. Je me souviens de ma peur bleue du tonnerre, où je me cachais la tête avec un coussin, étant gamine. Je me souviens de la joie d'aller dans mon lit bien chaud les soirs d'hiver et de me pelotonner dans une couverture. Je me souviens, je me souviens... Je me souviens d'anecdotes sur mon enfance que j'avais oubliées et que m'avait racontées mes parents.  Je me souviens de rires, de fous rires, de jeux, d'ennuis aussi. Je me souviens et je profite du bonheur de la jeunesse qu'est d'avoir quatorze ans, de savoir qu'on a l'enfance derrière soi, mais la vie devant...

Je me souviens que je ne savais pas quoi écrire il y a dix minutes, mais je constate avec surprise et sourire que ma feuille et pleine, alors je devrais arrêter d'écrire...

Christina

mardi 26 novembre 2013

Elle avait tout vu, tout senti, tout dit et tout entendu...



Aujourd'hui, il était trop tard... Elle était devant un miroir, qui lui reflétait son image. Un beau visage à ce jour creusé par de fines rides; exprimant une longue expérience de la vie.

Ses yeux gris, perlés de vert montraient de la sagesse et un lointain souvenir vague et énigmatique de la jeunesse. Des yeux qui avaient tout vu, admiré, scruté, aperçu, observé, tant de choses; tant de  beautés : les doux champs de blés dorés à la lueur de l'automne, les belles montagnes, la mer si profonde et infinie, la campagne si sereine et apaisante, la forêt si sombre et silencieuse, la nuit si inquiétante et menaçante...Des yeux qui avaient tout vu. 

Un visage délicat et aux traits fins ainsi qu'un grand nez. Combien de fois ce nez elle aurait voulu l'avoir petit ! Elle ne s'en souvenait plus tant ce souhait l'avait ardemment hantée dans son enfance. Un nez qui avait humé, senti, respiré, aspiré tant de choses : l'odeur enivrante des roses à l'aube du printemps; la senteur fraîche et piquantes des champs de lavande lorsqu'elle allait en cueillir pour sa mère les soirs d'été; et celle des épices cannelle, gingembre, curry... elle les connaissaient toutes ! L'odeur du pain cuit, elle n'aurait pu l'oublier !  Un nez qui avait tout senti.

Un visage si gracieux et une bouche si petite, une "cerise" lui avait-on dit. Des lèvres qui avait tant dit, tant hurlé, crié, braillé, menacé, tempêté; mais aussi consolé, calmé, réconforté, et qui avait quelques rares fois souri... Des belles paroles qu'elle avait récitées; yeux clos; dans la nature; qu'elle avait déclamées avec respect et cérémonie. Une bouche; des lèvres qui avaient tout dit.

Un visage de poupée, à la différence qu'il aurait pu et semblait être en porcelaine, mais qui ne l'était pas...Deux oreilles, petites et discrètes, qui avaient tant entendu : des secrets, des mystères, des mots interdits, des insultes, des horreurs, des malheurs; des belles paroles encourageantes et aimantes. Elle avait tout entendu.

Un visage vieilli et amaigri, qui un jour avait été celui d'une déesse, personne n'en avait douté à l'âge de ses vingt ans. Une chevelure désormais grise qui avait été, autrefois; ondoyante, ruisselante comme une coulée d'or. Des cheveux qui avait été tant de fois tressés, coiffés, peignés, lavés, lustrés... Une chevelure dont le plaisir de la brosser avait été un bonheur de la jeunesse; malgré des souffrances en tant que petite fille sous les coups de brosse déterminés à évincer les épais nœuds se cachant au fin fond des cheveux... Des "boucles d'ange" disait sa Tante Rose à ses 15 ans. 

Un visage marqué par la vie, les épreuves, le bonheur, le malheur, la tristesse, la joie, la honte, la révolte, l'amertume, la colère, la mélancolie, la compassion, l'amour, l'amitié... Par la Vie. Une existence peuplée de rêves, de songes, d'illusions, de fantasmes, de souhaits; espérés, souhaités... Une humaine qui avait tout vu, tout senti, tout entendu, tout dit...

Un visage exprimant la paix...
Oui elle avait été heureuse...
Un destin arrivant au terme de son voyage.
Un dernier petit sourire.

La fin.

Deux yeux perlés qui se refermèrent à tout jamais...


La paix, le néant, le vide....
Plus rien...



Christina