jeudi 18 octobre 2012

Ana(rock)phore

    Je me souviens d'un objet lourd, rare, important, à la poignée trop grosse et aux trous de cadran coupants. De sa lenteur à composer les numéros impossibles à modifier sans tout recomposer. Heureusement, il n'y en avait que 6. Le 22 à Asnières n' était plus qu' une blague de fin de banquet républicain. Dans un lieu de passage, ou au contraire un cabinet secret, c'était selon ... le nombre de cadavres familiaux probablement.
    Je me souviens des 1° mobiles aussi, format batterie 12 volts blindée militaire, antenne stratosphérique, extraits mi-nu-tieu-se-ment de leur étui, un 4x4 gonflé au bitume ciré. C'était bien avant la Rolex de leurs 50 ans.
    Je me souviens de ces nuits blanches, passées à composer des listes successives de numéros modem dans la pénombre d'un bureau transformé en cellule monacale dédiée au culte du dieu Cyber, pour envoyer quelques zéros et presque autant de uns, ou en recevoir d'aussi anonymes correspondants sans visage. Une décharge de clics, un hululement de porteuse et le frisson du voyant vert, après le rouge tout bouge. Vers un autre cagibi désert, dans un autre fuseau horaire.
    Je me souviens de ce passage initiatique des collégiens vers le GSM, l'ouverture frénétique du carton surdimensionné  d'avant le greenly correct. Le vibreur n'était pas seul à rêver d' impunité après des soirées non (r)accompagnées et de sorties - de route. Magie du sans-fil à la patte, caméléon.
    Je me souviens aussi de ces moments passés à l'attendre, le tamagoshi conscient des piles en fuite, sans savoir si elle, oui, elle, se trouvait derrière un de ces murs qui ne se rappelaient même plus à quoi avait bien pu ressembler une mandoline.
    Je me souviens enfin de ce SMS si récent, ici recopié, afin qu'il fane et reste:
" Ce jour à midi
Le soleil, après la pluie
a illuminé ton sourire béni.
Et on ne sait lequel des deux
a le plus ébloui ceux qui étaient ici."