mardi 22 octobre 2013

Sur le sol de la cuisine rue Jean de Bernardy.

Depuis longtemps, droits comme deux  i sur le matelas maigre. Au-delà des persiennes, la lune blanche et décapante comme de l'acide sulfurique trace au peigne des rayures  sur nos rétines
alors, l'œil  de l'autre surgit dans la pénombre
Alors, voilà la Lolita, celle du palier d'en face avec des jambes qui n'en finissent pas
alors, elles, descendues d'une jupe à volants irisés ; dans les replis de l'étoffe, un obscur objet
Cavité, ovale, humide, ourlée de poils comme des cils.
Lui, comme un i, chausse dans sa main voluptueuse une charentaise jusque là rangée, sage, sur la tomette rouge .
Il la passe sur mes  rondeurs, duvet de laine sur duvet de peau il descend, à mesure que sa chandelle monte
il fredonne, il susurre et parcourt en saccades une forêt profonde toute en ramilles crissements et sueurs
alors, la Lolita sans les volants se fait horizontale. Elle est là, au sol, petit o au milieu de nous deux i
alors, nos armes digitales explorent une conque inconnue, secret de l'ombre éblouie par flashes  sous l'acide blanc de la lune
alors, lui écluse avide  nos essences de chair
alors, elle, toute en ailes consume le pâle plumeau
et la lune tourne et se perd et disparaît en même temps que nos souffles ébahis
nous chantons à l'unisson tels des sirènes, des cascades, les  roulis au loin dans la fontaine des Danaïdes
alors, la nuit descend chamane des ténèbres et l'air se fait silence
alors, depuis longtemps nous, droits comme deux i sur le matelas maigre,
le matin avance, puisant sans se lasser à la chamade de nos songes
À l'impossible nul n'est tenu.

Nicole