lundi 3 mars 2014

un intrus chez moi

Je me présente:"Hugues, c'est moi son saint protecteur maintenant, je me suis introduit chez elle, un premier Avril comme il se doit, c'est ma fête tout comme la sienne, alors tout est permis."
J'ai à peine passé la fenêtre que je hume son eau de toilette, Nina Ricci mais l'odeur est plus douce qu'autrefois et le flacon aux petits oiseaux n'est plus là, ce doit être de l'eau de parfum, normal elle n'a plus les même moyens. Mais cette petite bouteille en forme de pomme est jolie aussi, elle ne dépareillera pas la collection. Où l'a- t -elle installée cette collection? Pas dans la salle de bain comme autrefois, je ne la vois pas. Je me faufile dans le couloir, que de placards!Il n'y en avait pas tant là bas dans l'autre maison. J'ouvre une porte,tiens les voilà, les flacons, tous alignés, dépoussiérés, elle a gardé ses habitudes. Je dois me trouver dans la pièce des collections, les cactus sont là, les dés à coudre, elle a encore celui  qui est tout percé, celui de sa maman , elle a tant cousu sa maman que le fer n'a pas résisté, pourquoi le garder, je vous le demande!Que voulez vous, elle a la collectionite, c'est une manie qui rassure. Je ne vois pas la boite des marque-page, je vais chercher, je passe dans la pièce opposée, ils sont surement là, les murs sont tapissés de livres, tiens ils ne sont plus enfermés, ils sont étalés sur un guéridon en compagnie de ses chers crayons, que des crayons à papier, des H.B. de préférence, sans doute à cause de ses initiales, vous ne lui direz pas elle pretend qu'il s'agit de pression sur le papier où elle couche ses émotions.Ils proviennent de pays traversés avec son aimé, de musées visités et je ne m'attarderai pas sur les broderies de la grand mère et des taties d'ailleurs il n'en reste que quelques unes de visibles, celles qui racontent une histoire, un bout de vie comme tous les objets ici. Les pelotes de laine sont présentes aussi mais pas d'ouvrage en cours, elle a délaissé les aiguilles ma fille. Il faut dire qu'il y a aussi les instruments alors évidemment, il faut de la place pour tout ça.
Mais attention, elle est là, à son bureau, elle colle des plantes dans un carnet, elle va se lancer dans un herbier! Elle observe à la loupe, cherche des noms dans un manuel latin. Sans fin cette collectionite, une vraie maladie!
Pas très corbuséin tout ça! Mais enfin, c'est son nid, elle a besoin de l'adoucir des étapes de sa vie.
Et là haut? Dans cet appartement, il y a en bas et en haut. Je monte le bel escalier de Jean Prouvé et me voilà au dessus, tout est en ordre, chaque chose a sa place, rien ne traine, elle est toujours maniaque, il faut que je l'oblige à abandonner un peu les balais. Il parait qu'elle ne peut rien faire si tout n'est pas cadré, programmé, j'en veux pour preuve l'agenda qui ouvert à la page du jour à côté du bouquet de fleurs fraiches, à croire qu'elle a peur d'oublier de respirer. Respirer, elle en grand besoin. C'est peut être ce qu'elle fait en lisant les cartes postales alignées sur l'étagère. Je m'approche et ose lire quelques missives:
"Tout est possible dans le jeu de la vie"
"Je t'envoie un peu de douceur"
"Offrir aucune résistance à la vie, c'est être en état de grâce"......
Même si ces lectures ressemblent encore à un début de collection, je ne suis pas en rage au contraire, elles me soulagent, je ne suis pas le seul à me soucier d'elle et elles sont belles ces cartes, il y a encore des talents dans ces nouveaux temps.
Avant de quitter les lieux, je vais en ajouter une:
"Allez ma vieille, respire et laisse toi aller!!!"
Si je savais peindre, je la décorerai de mon icône.

Hugues  saint protecteur