Nous mettrons tous nos masques et les autres attendront mon
signal. Je déclencherai la bombe en criant : » Ca va puer, courrons ! »
Nous nous enfoncerons alors dans les galeries sombres et étroites, espérant être
plus rapides que le gaz, en espérant surtout qu’il envahirait toute la partie
supérieure de la grotte. Nous marcherons longtemps sans nous arrêter, les uns
derrière les autres, nos têtes heurtant parfois la roche, nos pieds glissant
sur le sol humide. Enfin nous parviendrons à la cavité suivante. Nous
contournerons prudemment le petit lac, longeant la paroi et nous agrippant
comme nous le pourrons. Et enfin nous pourrons sortir à l’air libre, après
avoir gravi un monticule rocailleux masquant presque cette deuxième ouverture.
Pendant notre périple obscur à peine éclairé de nos lampes
frontales et alourdi par les combinaisons de protection, les autres, restés à l’entrée
de la grotte, s’emploieront à en refermer l’orifice. Ils actionneront le levier
de métal issu de la vieille traverse de chemin de fer et feront basculer le
rocher devant l’ouverture. Ils la colmateront avec le ciment fraîchement
préparé et repartiront, laissant tout le matériel sur place. Ils
dévaleront la colline, la contourneront et viendront nous retrouver. Ils nous
aideront à bâtir le mur que nous aurons commencé, fermant ce deuxième accès à
la grotte maudite.
Tel était le plan. Si tout se passait bien, le Master virus, cantonné
dans la partie haute de la grotte serait asphyxié par le gaz mortel et nous en
serions débarrassé à jamais. Ses tentacules fibriculaires se désagrégeraient et
les virus secondaires mourraient à leur tour très rapidement, privés de leur
tête vénéneuse. Nous nous en assurerions en allumant des fumigènes scintillants
partout dans la ville, seule détection possible des fibricules normalement invisibles.
Il nous restera alors à reconstruire nos vies, nos
villes et nos rêves. Et nous repartirons, rassemblés et unis par un même espoir
d’une humanité retrouvée, transformée, savante, lumineuse et paisible.