mercredi 5 novembre 2014

Marseille rêvée

Je voyais un tourbillon de couleurs, vivant, palpitant, débordant. Ça riait et ça criait, partout. Un labyrinthe, un foutoir, sale et bordélique, mais qui resplendissait sous la lumière. Il y faisait chaud, sauf quand le vent, ce vent, soufflait. Elle avait un bon côté, ce visage souriant, moqueur parfois. Des ruelles comme des rides, elle qui était la plus vieille. On s'y perdait, dans ce dédale, gauche puis droite, puis encore à droite, et encore à droite, tant de fois, trop de fois. Et puis d'un coup, la mer. Un iris glauque, chassieux de tous ses bateaux, surplombé par de l'or, comme ces bijoux qui leur perçaient les joues, à ces jeunes filles. Comble du mauvais goût, cette touche de trop typique de leur mère, si bonne. Mais elle avait aussi un autre visage, le mauvais, le septentrional. Celui qui riait et qui criait, mais qui cognait et qui tuait aussi. Et le sang, le sang qui coulait, qui ne faisait que ça, depuis si longtemps, depuis toujours, jour comme nuit. La nuit qui y était comme le jour, aussi vivante, aussi bouillante, dont le cœur tonnait quand le ballon entrait dans les filets, ce cœur blanc et vociférant, qui battait son rythme, qui la faisait vivre, plus que partout ailleurs, plus fort qu'ailleurs, pour le pire comme pour le meilleur. Un cœur qui battait comme la foule qui chantait, comme les pieds qui la martelaient, comme les balles qui claquaient, comme le vent qui soufflait, comme la mer qui allait et venait.