vendredi 12 juin 2020

2 septembre 1939


Sur le boulevard Jean Jaurès à Boulogne sur Seine le 2 septembre 1939 il ne se passa strictement rien. Pas un piéton dans cette rue commerçante, pas d'enfants à faire du patin à roulettes, les parents ne voulaient pas. Aucun autobus, ils étaient restés au dépôt.

Aucun couple ne déambulait la main dans la main. Pas une goutte de pluie malgré un ciel très gris, pas de pigeons à becqueter par terre, ils étaient cachés dans les arbres. Pas de feuilles d'automne qui se détachaient des branches, pas encore. Pas le moindre souffle de vent. Même le facteur n'était pas passé. La boulangerie ouverte vendait quelques baguettes, moins que d'habitude.

Aucune voiture ne roulait. Aucun coq ne chantait. Le concierge n'était pas sur le pas de sa porte. La grande affiche du cinéma annonçait un programme qui ne tentait personne. Devant cette rue sans vie le confiseur avait baissé son rideau de fer.

A Boulogne ce jour-là il n'arriva strictement  rien. Les habitants étaient terrés chez eux. A 20h, l'heure du journal parlé, chaque famille s'était réunie devant le poste de TSF pour écouter ce qui se passait en Pologne, puis était allée se coucher sans échanger un mot. Les enfants ne comprenaient pas mais se taisaient aussi, ils n'osaient pas poser de questions.

Tous se doutaient, tous savaient que le lendemain il se passerait quelque chose.