Ce
matin je vais au boulot, comme d'habitude, mais ma 2CV ne veut
pas démarrer. "C'est la batterie" me dit un voisin, "on
vous pousse avec un copain en haut de la pente et vous descendez
doucement, la voiture va démarrer toute seule. Enlevez bien le frein
à main surtout."
Merci
messieurs, mais nenni, le moteur ne se met pas en route.
Je
me gare là où je peux, au risque d'avoir un PV, et pars au bureau
en bus, debout bien sûr, il est plein à craquer.
A
peine arrivée je commence à enlever mon manteau mais la chef
m'aperçoit : « Non, ne te déshabille pas, tu montes
à l'hopital Nord, il y a une urgence. Tu n'as pas de voiture ?
Mince ! » Un collègue s'approche : « Je
monte à Aix, je te dépose, tu rentreras en bus, le 96, juste devant
l'entrée de l'hopital »
Je
passe la journée là bas, agacée, l'urgence n'en était pas une, et
à midi j'achète un sandwich immangeable avec une bière qui n'en
n'a que le nom.
Vers
17h j'ai fini, je remballe mon dossier, enfile ma veste, cours vers
l'arrêt du bus. Mince, il pleut , je n'ai pas de parapluie.
J'attends
un moment, sur un pied, sur l'autre, bizarre, personne n'attend le
bus.
Un
homme qui passe par là m'informe qu'il n'y aura pas de bus ;
suite à une agression, ils sont tous à l'arrêt.
« Vous
pourriez m'accompagner en voiture, monsieur ? Je vous
dédommagerai bien sûr »
Je
sais que je suis plutôt belle et bien roulée, et que ne ferais-je
pas pour rentrer vite.
« Ah,
non ma petite dame, moi j'habite ici, je ne vais pas me lancer dans
les embouteillages pour vos beaux yeux. Il y a des taxis vous savez,
mais quand les bus sont en grève, ils sont pris d'assaut »
Je
commence à avoir envie de pleurer en pensant à ma 2CV mal garée.
Bon, je vais faire les dix km à pied.
Non,
il pleut trop, je pleure trop, je retourne dans le hall de l'hopital,
trempée, défaite.
Un
infirmier que je connais vaguement m'aperçoit. Ce n'est qu'il soit
beau, ni riche, ni costaud, mais je tombe dans ses bras. Mon humidité
ne semble pas le gêner. Il est de nuit, il y a une chambre libre
dans son service, si je veux m'y réfugier... Pourquoi pas ? Mon
mari est en déplacement, je ne vois pas qui appeler au secours.
Alors, une chambre à l'hopital, ce n'est pas beau, ça ne sent pas
bon, mais il y a un lit, deux même, et il fait chaud. Mon infirmier
me promet de m'apporter un bol de la soupe des malades.
Après...
ce n'est plus le présent, c'est le futur, alors je ne raconterai
pas...
ooooooooooooooooooooooooooooooo
Ce
matin je dois partir au boulot, comme tous les jours
Heureusement
j'ai un boulot
Malheureusement
il est loin de chez moi
Heureusement
j'ai une 2CV
Malheureusement
elle est vieille et ne veut plus démarrer ce matin
Heureusement
il y a un bus direct
Malheusement
il est bondé
Heureusement
je descends au terminus sans problème
Malheureusement,
à peine arrivée, ma chef m'informe qu'il faut partir travailler
à
dix kilomètres de là.
Malheusement
je me rappelle que je n'ai pas de voiture
Heureusement
un collègue propose de m'accompagner
Malheureusement
le boulot qui m'attend est long et ininteressant
Heureusement
je peux finir assez tôt et aller m'occuper de ma 2CV
Malheureusement
il pleut
Malheureusement
les bus sont en grève
Malheureusement
personne n'accepte de me raccompagner
Malheureusement
j'ai très envie de pleurer
Heureusement
un vague collègue s'approche et me prend dans ses bras pour me
consoler
Malheureusement
j'aurai surement un PV pour le stationnement de ma 2CV, peut-être
même est-t-elle à la fourrière
Heureusement
mon collègue est chaleureux, il me propose une chambre dans son
service à l'hopital et de la soupe
Malheureusement
la chambre n'est pas belle et ne sent pas bon
Heureusement
le lit est correct et je vais pouvoir dormir
Heureusement,
malheureusement mon infirmier entre doucement et s'approche de moi
Heureusement,
malheureusement, je ne sais pas encore...