mercredi 7 novembre 2018

Rêve 3- Louise


Il jouait souvent près du puits, à côté du cimetière. Je le distinguais de loin lorsque je passais en vélo sur le chemin pour me rendre à l’école. J’ignorais qui était ce garçon. Je l’enviais un peu car bien que toujours seul, il semblait très occupé à s’amuser. Il m’intriguait et je brûlais d’envie de connaitre ses jeux et de me joindre à lui. Il était tranquille ici, à l’écart du village, près du grand jardin calme. Le puits aussi m’intriguait. Il semblait abandonné. En tout cas, je n’avais jamais vu personne y puiser de l’eau et je me demandais à quoi pouvait servir un puits si ce n’était pour y chercher de l’eau. J’étais sûre que le garçon saurait répondre à mon questionnement. Il était comme le gardien du puits, comme il y a des gardiens de phare. Il y semblait si étroitement lié.

Ce jour là en revenant de l’école,  il n’y avait personne près du puits. Je quittai alors le chemin pour m’en approcher, posai mon vélo au sol et avançai en espérant trouver quelque élément du jeu qui accaparait tant le garçon. Je ne trouvai rien que de l’herbe et des cailloux. J’avançai encore et me penchai au-dessus du puits. L’intérieur était sombre et je n’y vis rien. Il devait donc être très profond, trop profond pour y aller puiser de l’eau, me disais-je en  scrutant l’obscurité, y cherchant une vérité.

« Tu veux venir avec moi ? » interrogea alors une voix que je n’avais jamais entendue auparavant et que pourtant je reconnue. C’était la voix du garçon qui jouait près du puits.

Nous partîmes ensemble en direction du fond du puits. Il n’y faisait pas froid, il n’y faisait pas chaud, l’air y était doux et nous n’avions pas besoin d’y voir clair car il suffisait de se laisser porter, comme guidés par le puits. Nous parvînmes tout au fond, où s’ouvrait une large brèche débouchant sur une plage ensoleillée. Il y avait la mer avec ses vagues qui roulaient, scintillantes d’étoiles qu’elle venait déposer sur le sable.

« Comme c’est beau ! » M’exclamai-je. Je me mis à courir dans les vagues en riant et les vagues semblaient rire et jouer avec moi, ornant mes cheveux de perles étincelantes.

Essoufflée, je revins vers la grève où le garçon murmura dans un sourire : « c’est bien, ici ».

« Alors pourquoi vas-tu jouer là-haut, près du puits ? » demandai-je ?

«  C’est pour faire rêver les enfants » dit-il, souriant toujours.

Quelqu’un heurta mon bras. « Tu dors, Louise ? »

J’ouvris les yeux. Je m’étais endormie sur ma table d’écolière.