lundi 16 février 2015

Journal d’une femme ordinaire.


Samedi 24 Janvier 2015.
Ça y est, il s’est enfin dévoilé ! En allant prendre sa douche il a laissé tomber son portefeuille. Je l’ai ramassé, ouvert et j’ai tout vu ! Il y avait dedans la photo du visage d’un jolie jeune femme brune avec écrit au dos de sa main « à mon Anouchka chérie ». Bien vite le l’ai ramassé, j’ai tout remis en place et je suis retournée au lit, faisant semblant de dormir.

Dimanche 25 Janvier.
Cet après midi, il s’est absenté sans raisons. Il est rentré tard le soir. Son haleine puait l’alcool. La photo avait disparu.

Lundi 26
Cette nuit, j’ai fait des rêves bizarres : j’étais dans mon lit, je n’arrivais pas à bouger et c’était comme si les murs de l’appartement se rapprochaient peu à peu. Sa présence invisible remplissait tout l’espace.

Mercredi 28
Le soir, il est revenu avec des fleurs et des gâteaux. Pendant toute la soirée, il a été très gentil. Au moment de se coucher, j’ai fait semblant d’être malade. Dans la nuit, j’ai compris qu’il ne dormait toujours pas. Le silence entre nous était comme une menace.

Vendredi 29 janvier, dans la nuit.
Son visage a changé, je m’en suis brusquement rendu compte ce soir. Ce n’est plus le même homme. Je n’arrive pas à comprendre pourquoi. On dirait un étranger. Quand il passe une porte, il me fait penser au charcutier de la Schawzgasse. Ses doigts sont rouges, épais et sa peau blanche me fait penser à celle d’un cochon.

Dimanche 1 Février.
Hier samedi j’ai découvert dans le sac des courses un grand couteau de boucher. J’ai failli m’évanouir de peur. Heureusement, il était à ce moment là dans la salle de bain. Après, naturellement, il l’a sorti et s’est mis à découper une grande pièce de bœuf qu’il avait achetée la veille. On dirait qu’il a fait cela toute sa vie ! Moi, le plus calmement possible, j’ai épluché les carottes et coupé les oignons. C’est vrai, j’ai bien pleuré. Après, il a tellement bu et mangé qu’il s’est endormi tout de suite. Moi, de soulagement, cela m’a donné envie de chanter.

Lundi 2.
Tout à l’heure, quand il m’a vu dans ma robe du dimanche, la valise à la main, il n’a plus dit un mot. Son visage s’est fermé. J’ai vu que ses mains tremblaient. Je lui ai dit que j’allais chez ma mère chercher des affaires. Pendant tout le trajet, j’ai pensé à mon mensonge. Dans la valise, il y a mes affaires pour partir et je n’ai rien dit.

Mardi 3.
Chez ma mère, ce n’est vraiment pas drôle. Elle passe ses journées devant sa fenêtre, sans rien dire. Moi aussi, je ne lui ai rien dit. On a mangé en regardant la télé et puis après chacune est rentrée derrière les murs de son silence. J’ai ressenti un grand vide. Difficile à décrire.

Mercredi matin.
Je suis revenue. Chacun a fait semblant qu’il ne se passait rien. Lui, parle pour ne rien dire, moi je reste dans mon silence. Le soir, il a bien fallu passer à la casserole. Heureusement ce fut rapide. Après, j’avais mal.

Jeudi 5 Février
Je n’ai plus faim : Je lui fais quand même à manger, cela m’occupe. Et puis, si j’arrêtais, il ne comprendrait pas. Alors que j’avais tout préparé, il n’est pas rentré. J’ai pensé à la photo.

Vendredi.
Aujourd’hui les choses sérieuses ont vraiment commencé : en revenant il a rien dit et a commencé à me cogner, comme cela, sans prévenir !

Samedi
Ça recommence, j’ai peur !

Dimanche
La nuit dernière, j’ai fait un drôle de rêve : L’énorme cochon de tante Lucie était mort en mangeant de la mort aux rat ! Au réveil, je me suis mis à rire ! Lui, m’a pris pour une folle et est parti sans rien dire. Je ne l’ai pas vu de la journée

Mercredi 11 Février
J’ai bien réfléchi à l’histoire du cochon de tante Lucie. Dans l’après midi, j’ai pris ma décision, ferme, définitive ; J’ai été à la droguerie, là ou il a acheté le couteau. J’en ai pris un sac. Dessus, en rouge on avait dessiné un rat bien mort avec en dessous écrit « Effet garanti » Cela m’a fait du bien ; Pourtant, je ne me sentais pas à l’aise. Au fond de la boutique, j’ai cru voir une personne qui  m’observait ; Je me suis dis que je devenais folle.

Jeudi :
Ça sera pour samedi ! Normal c’est la St Valentin ! j’ai fini de faire les courses ! Pour faire bien vraisemblable j’en a mis quelques petit tas dans le grenier.

Vendredi 13:
j’ai commencé à faire la cuisine, en faisant mariner les morceaux de bœuf dans du vin avec des oignons et des carottes. Quand il m’a vu travailler, je lui ai dit que c’était une daube pour demain .Je crois qu’il est content …. Cela va me porter bonheur !

Dimanche 15 Février:
Je vais tout vous raconter, cela s’est super bien passé ! Le soir comme je savais que cela aller être la fête, j’ai mis ma petite robe d’été avec tout les accessoires. Après, au fourneau, ma belle ! A la fin de la cuisson, j’en ai mis un bon verre dans la sauce ; Au repas, l’ambiance était bonne ! Je lui ai dis que pour lui, je ne prenais que de la soupe pour rester mince. Lui, il s’est resservi ! L’effet garanti s’est bien produit ; C’était un peu dégueulasse, mais bon, il l’avait bien cherché ! Comme je ne suis pas bête, j’ai pris soin d’appeler le médecin. Seulement, c’était un peu tard ! En signant le papier, il m’a lancé un regard bizarre et m’a dit qu’on viendrait le chercher que demain. J’ai passé le reste de la nuit sans fermer l’œil ; J’en ai profité pour faire le ménage et surtout la vaisselle.

Lundi :
Ouf ! , ils l’on emmené ! Bon débarras ! C’est qu’il en prenait une place sur la table du salon ! Il était vraiment gros et lourd ! Quand j’ai remarqué que les types de la morgue faisaient la tête, je leur ai proposé un petit verre de vin. Ils ne se sont pas fait prier ; Moi, dans ma petite robe noire et avec mes yeux frottés aux oignons, j’ai bien pleurniché. Je suis sûr que l’un des deux, à sa manière de me regarder m’aurait bien consolé…

Mardi :
C’est les vacances, enfin ! Je me suis consolé toute seule. Tu vois, ma petite, avec ton imagination tu vas pouvoir aller de l’avant !

Mercredi :
En deux temps trois mouvements les obsèques ont été réglés ! Vite fait bien fait !

Jeudi :
Je croyais être enfin tranquille mais ça m’est tombé dessus sans crier gare : Au petit matin sur un coup de sonnette, les gendarmes ont débarqué. Ils m’ont dit que sa maîtresse m’avait dénoncée ! J’ai reconnu sa photo. Manque de bol, justement, elle travaillait à la droguerie ! Elle a tout vu ! Elle savait tout !

Vendredi :
Devant le juge d’instruction j’étais calme. J’ai tout raconté, sans problèmes. Mieux, ça m’a fait du bien de parler un peu. Lui, m’écoutait gentiment, je suis sûr qu’il me comprenait !

Samedi :
Ma nouvelle vie commence ! C’est bizarre, je me sens bien : dans ma prison, je me sens presque libre. Je parle toute seule !