mercredi 18 mars 2015

plus besoin d'attendre

18h.,Mario a rejoint son lieu de prédilection, il boit une première tasse de café prélevée de son thermos, il est confiant, il s'est préparé minutieusement, il rêve de cette rencontre depuis si longtemps. Il pressent depuis quelques jours que le moment est venu, ce n'est plus une chimère, il est persuadé que son souhait va se réaliser. C'est sans crainte qu'il attend le coucher du soleil, les rougeurs du soir sont les témoins de son obstination. Tout vient à point à qui sait attendre. Alors il attend, telle une sentinelle quitte à prendre racine s'il le faut. Pour l'instant, il est calme , impassible. Soudain un frisson d'impatience parcourt sa colonne vertébrale. "Il faut se dominer", un autre café va aider à réfréner cette frénésie naissante. "Se tenir à l 'affût, camper dans ses certitudes et veiller, ne pas s'endormir, il faut être attentif au moindre bruit et habituer son regard au changement de lumière qui passe dans la fente de la cabane." Il supporte facilement la fraîcheur du soir mais il s'accommode difficilement du silence, son coeur se met à battre tel un tambour, ses extrémités sont froides pourtant des gouttes de sueur perlent sur son front, il tremblote, ce n'est pas le moment, le geste doit être sur s'il veut aller au bout de son projet photo mais il a du mal à garder son sang froid. De plus sa position le fait souffrir, des fourmis s'emparent de ses pieds, l'engourdissement le guette pourtant il ne faut pas bouger. Le coeur bat la chamade, des palpitations s'emparent de son corps, il est sur des charbons ardents. Pas bouger, rester stoïque, se contenir, ne pas se laisser envahir par le doute, demeurer là, confiant. Pas bouger , difficile quand une herbe vient vous chatouiller le nez. Il ne manquait plus que ça! le nez frémit, il serre les dents pour stopper les éternuements, il pleure, renifle, cherche à calmer cette réaction stupide des narines devant un simple brin d'herbe. Agacé, il marmonne:"Pas ça, pas ça,pas maintenant, voilà cinq printemps que j'attends! Il pleure. les sanglots secouent sa carcasse, dehors , un battement d'ailes, c'est loupé. Il se déplie, sa désillusion exacerbée, il se met à taper des pieds, il se traite d'idiot, il en veut à la terre entière, c'était encore un mauvais présage. Dans un coup de talon incontrôlé, les lames du plancher cèdent sous les pieds. Mario est dans l'eau de l'étang, et là plus besoin d'attendre, les aigrettes huppées s'ébattent sous son nez au milieu des roseaux. Elles ne voulaient pas être prises en photo!