vendredi 22 janvier 2016

L'Enfer

15 août (enfin j'imagine que c'est le 15 août, mais après tout je n'en sais rien et je n'ai aucun moyen de le savoir). Je suis mort. Un truc bête : je me suis pris un camion. Évidemment, ça n'a pas fait un pli. J'y suis passé en un quart de seconde à peine. Et de là, directement en enfer. Mécréant comme je suis, ce n'est guère étonnant que les portes de là-haut me soient restées fermées. Chose plus amusante, je suis attendu. Apparemment, mon apostasie galopante et ma tendance au blasphème éhonté me valent d'être traité comme une sorte de VIP. De fait, je n'ai aucune intention de me repentir, aussi les feux de la Géhenne ne me font – au contraire des pauvres hères que je croise – que l'effet d'un doux soleil de printemps.

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25 décembre. Le temps, bien que relatif, est apparemment une donnée universelle. Aussi puis-je affirmer qu'on est effectivement le 25 décembre. Aujourd'hui je reçois mes galons pour rejoindre le Cinquième Cercle. Notez que les « Cercles » sont bien mal définis. Pandemonium ressemble davantage – du moins pour ce que j'en ai vu – aux favelas de Rio qu'à Paris intra-muros. On y mange bien, cela dit. La cuisine de rue est exceptionnelle. Ben oui, la gourmandise est un péché, du coup on s'en sort pas trop mal dans le coin.

Les gens du 4C – dans la terminologie locale – sont des connards. Et je ne dis pas ça parce que ce sont des démons. Plutôt parce que ce quartier est celui des affaires, et que tous sont bien trop pressés pour être polis. Je détestais Mammon de mon vivant, je hais ses sbires maintenant que je les ai vus à l'œuvre. Une belle bande de monomaniaques suffisants.

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13 avril. Qui l'eut cru ? L'enfer est une démocratie. Mais une moderne, bien entendu, où les ténors de la politique ne changent jamais puisqu'ils sont immortels. Quoique. Ça a bien besoin de nouvelles têtes dans le coin. Et je ne suis pas le seul à le penser.