On ne traverse pas un fleuve
sans l’avoir longtemps longé. Un fleuve, c’est une rencontre, une rupture dans
l’avancée, une obligation de faire route à deux dans le paysage. On s’approche,
on épouse sa forme, on copine avec lui dans l’herbe des campagnes et les berges
de villes. Il trace le chemin, on court avec le courant, on se pose dans les
méandres, on rêve de se laisser emporter dans les tourbillons, on passe sous
les ponts et soudain, après une pile, on prend idée de passer dessus, d’aller
sur l’autre rive, on change de point de vue et parfois on remonte en sens
inverse : recherche de la source ou peur de se noyer avec lui dans
l’immensité de l’océan.
Huguette