dimanche 13 décembre 2020

 Entre ciel et terre

La pierre, il a toujours aimé cette matière. Petit déjà il allait dans les carrières, se couchait sur les blocs pour écouter le son de la terre, il caressait les veines, s’imprégnait de ce monde premier. Puis il voulut la faire parler, extraire ce qu’elle a dans ses profondeurs. Il voulut dégager son âme de la gangue enveloppante. Il commençait en douceur, la caressait, l’admirait puis quand il se sentait en harmonie avec elle il la travaillait pendant des jours et des jours, quand elle résistait, il la brusquait. Au petit jour, quand l’essence des entrailles se révèlait, il passait sa main rugueuse sur les formes naissantes et là elle apparaissait, ils se rencontraient, un vrai bonheur. Il a beaucoup exposé, il a connu quelques échecs parfois la pierre était muette. A tant sculpter, il se sentit prisonnier, il était en elle, il fondait son corps avec elle. Un jour, il entendit gémir, était-ce elle ou lui ?

Il eut envie de légèreté, envie de voir l’horizon, le ciel, le lointain, les nuages là-bas. Il voulut flotter dans l’espace mais se sentit incapable de quitter cet élément qui l’avait façonné, usé. Il devait garder le contact. Il entra dans le monde des rêves, il se surprit à ne rien faire, à rester dans son imaginaire, il a écrit des chansonnettes pour des rondes enfantines mais il avait besoin de s’ancrer pour rester lui-même. Il ne voulait pas décoller. Il finit par trouver l’équilibre entre ciel et terre.  Suivant son humeur, il choisit le barreau de l’échelle, plus ou moins près du sol, plus ou moins près du ciel.