dimanche 13 décembre 2020

 Le concours

Elle s’est levée tôt ce matin, jour de l’examen. Elle a préparé stylos, cartable et dossiers la veille. Elle est prête, ce concours, elle doit le réussir, elle suivra les traces de son idole, elle connait tout de sa vie, de ses travaux, elle a même visité sa maison. Elle a travaillé les équations, pris connaissances des virus, elle a révisé consciencieusement, elle s’est entrainée à la résolution de problèmes compliqués, elle s’est parfois endormie sur les devoirs, tard le soir. Elle est prête, elle monte par les traboules pour atteindre la grande bâtisse grise. Elle lit le fronton : institut Pasteur. Elle est fière, elle est prête. Après vérification d’identité, elle s’installe au bureau désigné, n° 4 de la deuxième rangée, un bureau qui sent bon la cire, des feuilles blanches, des éprouvettes, des lames de microscope. Son voisin de droite, elle ne le connait pas, celui de gauche lui sourit, son grand rival. Elle sera la meilleure, elle est prête. Devant le tableau noir, un surveillant en blouse et petites lunettes scrutent les candidats, elle l’oubliera, elle est prête. La cloche sonne, les sujets sont dévoilés. Elle enchaine les exercices sans difficultés. Juste au moment de conclure, un rayon de soleil traverse la pièce, s’attarde sur les éprouvettes, un arc en ciel joue sur le parquet. La lumière, le souffleur de verre, des formes ondulent, la magie de la transformation, le feu, la chaleur font oublier le froid des lieux. Des gouttes, des boules, des rubans se détachent, montent au plafond, se bousculent dans un cliquetis cristallin. Elle se perd dans la féerie du scintillement.

Soudain, un nuage, la salle retrouve le gris, elle se ressaisit. Il était temps, on ramasse les copies. En descendant le grand escalier, elle sait, elle a réussi. Elle poursuivra dans la chimie, tout est chimie mais peut-être pas ici, elle a découvert un autre agencement de molécules, une autre fenêtre s’est ouverte.