mardi 13 janvier 2015

Portrait de C.

Elle rit aux éclats, mi forcé mi amusée, elle ne veut pas commencer, elle tergiverse, élude, use à dessein de mots compliqués pour tenter de détourner l'attention. Bras croisés, regard de côté évitant le mien, elle se lance enfin. Elle hésite, n'est pas vraiment routinière dit-elle. Tout au plus, depuis que ses cheveux sont plus courts – je n'avais pas remarqué d'ailleurs, heureusement qu'elle me le dit – doit-elle, tous les matins, les brosser et les passer au sèche-cheveux pour les faire rentrer dans le rang. Oh deux minutes, pas plus. Elle mime. Elle surjoue un peu, l'exercice n'est pas si anodin que ça. Elle me défend en riant de détourner ses dires, d'en faire quelque chose de faux. Pas d'inquiétude à avoir, je lui dit. Elle rit, encore. Vient mon tour, dont je me débarrasse, et puis elle reprend, libérée. Elle a des routines, finalement. La montre perdue qui sonne à 5h30, qu'elle n'a jamais eu le courage de chercher – mais à quoi donc peut ressembler cette chambre si une montre y est introuvable ? –; le saut du lit, au sens propre, pour se réveiller, mimé lui aussi ; les Converse dépareillées, étourderie devenue habitude, mode lycéenne même, ayant contaminé ses amies. Et toujours ce sourire immense, cette voix forte, qui rit tout le temps. Tant de joie dans une seule personne, je ne savais pas que c'était possible.