jeudi 16 avril 2020

Visiter autrement


Mr et Mme Lepère
107 rue Edouard Vaillant Montrouge

Ils sont agés mais ont une grande vivacité d'esprit et le goût des rencontres. Natifs de Montrouge tous les deux, ils vivent ensemble depuis près de cinquante ans. Ils habitent un deux pièces au rez de chaussée d'un immeuble un peu décrépi qu'ils appellent leur loge, car c'étaient les concierges. A leur retraite ils ont été remplacés par un digicode mais ont pu garder leur domicile.

Ils connaissent presque tout le monde dans le quartier, les anciens ouvriers comme les nouveaux bobos, et ils aiment les commérages, ils prendront plaisir à vous en parler en vous servant un café bien serré, avec une petite « goutte » si vous voulez.

Toutes vos questions seront bienvenues et obtiendront réponse. Mais attention, il ne faut pas les appeler monsieur et madame. Lui, c'est le père Lepère, et elle la mère Lepère, ils y tiennent. En arrivant à Montrouge demandez à n'importe quel passant, il vous indiquera où les trouver.

Prévoyez deux ou trois heures pour la visite. Si vous voulez les enregistrer ils accepteront sans problème, sinon vous ne vous rappellerez pas de la moitié de ce qu'ils vous auront raconté.



Mademoiselle Blanche
3 Place Pigalle Paris

Elle reçoit de 19h à minuit, avant elle travaille, elle vend des chaussures et des frivolités dans un magasin pour touristes.

Elle est toujours impeccablement vêtue, coiffée, maquillée. Après vous avoir fait asseoir elle s'installera dans son fauteuil, jambes croisées haut, collant de résille et escarpins rouges à talons aiguilles.

Elle aime parler de son quartier, très visité, très cosmopolite, de ce qui s'y passe et que les touristes ne peuvent deviner. Mais attention, il y a des sujets interdits, son enfance surtout, elle met alors rapidement fin à l'entretien.

Elle reçoit volontiers les familles, les couples de tous ages, les femmes seules ou en groupe, mais jamais les hommes seuls. C'est inscrit sur une pancarte sur son guéridon : »Ne reçois pas les hommes seuls ». Elle a eu de mauvaises expériences, elle craint qu'on se méprenne sur son activité.


Eugénie Lerayer
La Boussac Ille et Vilaine

Si vous visitez le Mont St Michel, prévoyez une heure de plus, elle habite à deux pas dans la ferme familiale qu'elle tient seule depuis la mort de son mari.

Bien en chair, chignon blanc, blouse qu'on ne trouve que sur les marchés de la région, mais pas de coiffe bretonne, elle n'en n'a jamais porté, elle est trop jeune, elle vous le dira.

Elle parle beaucoup, de sa famille, nombreuse, de la vie du village, avant, maintenant. Mais vous ne comprendrez pas tout, elle a un accent tellement prononcé que certains mots vous échapperont, ne la faites surtout pas répéter, ça la vexerait. Elle ne parle pas breton, en Ille et Vilaine on n'a jamais parlé breton, mais patois, et elle mêle quelques expressions à la conversation.

Quelque soit l'heure de votre visite de 9h du matin au soir, elle ouvrira une bouteille de Bordeaux et vous servira dans des verres Duralex. Vous n'aurez pas le choix de refuser (sauf pour les enfants).

Et si vous lui plaisez, si vous lui plaisez vraiment, elle vous fera traverser la cour de la ferme, très fleurie, vous emmènera dans le pré le plus proche pour aller voir ses moutons à tête noire, et l'été ses agneaux nouveaux. Elle vous tendra une bouteille pleine de lait dont le goulot sera surmonté d'une tétine en caoutchouc et vous montrera comment faire téter un agneau. Si vous avez suivi la visite jusque là vous repartirez avec un souvenir impérissable.